Confrontée à des contraintes économiques et écologiques d’une ampleur inédite, la filière Veaux a mis en place un système de rémunération sécurisant pour les éleveurs, s’est engagée dans une démarche d’économie circulaire et parie sur sa capacité à innover pour faire évoluer le marché. Par Cécile Buffard
L’inflation va-t-elle fragiliser la filière Veaux ?
Gilles Gauthier. La France est le premier consommateur mondial de viande de veau, devant l’Italie. Les modes de production impliquent un coût de production élevé, qui est fortement impacté par l’augmentation des prix de l’alimentation et de l’énergie. Avec l’homologation du contrat type d’intégration, la rémunération des éleveurs de veaux est sécurisée. Pour autant, la filière doit faire face à la forte augmentation du coût de construction des bâtiments d’élevage, qui pénalise le renouvellement des générations. Rappelons qu’en France, environ 80 % de la production est réalisée dans ce cadre. Au titre de ce contrat, les entreprises fournissent aux éleveurs les jeunes veaux, l’aliment destiné à leur engraissement ainsi qu’un encadrement technique et sanitaire. À l’issue de la période d’élevage, elles se chargent de la commercialisation des animaux. De leur côté, les éleveurs sont propriétaires d’installations adaptées à ce type de production, et rémunérés pour leur prestation d’élevage. Ils assurent la conduite d’un élevage très spécifique. Cette solution leur garantit ainsi un revenu stable, indépendant des risques des marchés. En travaillant à la généralisation du contrat d’intégration fin 2019, la filière s’était fixé comme objectif de favoriser l’installation de nouveaux éleveurs et la création de nouveaux bâtiments d’élevage, offrant plus de confort et de bien-être aux animaux, ainsi qu’une meilleure empreinte environnementale.
Comment les entreprises s’adaptent-elles aux exigences environnementales ?
La filière Veaux est une production constitutive d’une économie circulaire. Elle participe à une valorisation vertueuse de plus de 60 % des mâles issus du cheptel laitier, et valorise également une part importante de coproduits dans la ration (lactosérum, coproduits céréaliers). C’est une filière génératrice d’emplois. À noter, la part importante de coproduits très bien valorisée : abats, cuir, présure… La production de veaux est fortement mobilisée pour répondre aux attentes sociétales : investissement dans des systèmes de méthanisation et de panneaux photovoltaïques pour tendre vers une production climatiquement neutre ; amélioration de l’efficacité alimentaire des rations ; approvisionnement responsable en matières premières ; aménagement des bâtiments d’élevage pour améliorer la santé et le bien-être des veaux. La filière s’est récemment fortement investie dans un projet de construction d’une étable expérimentale collective pour l’élevage de veaux, porté par l’Idele, sur le site de Mauron. L’ambition d’un tel projet est d’accompagner la transformation de la filière veaux française vers des pratiques plus durables et responsables, répondant aux attentes des consommateurs tout en créant de la valeur ajoutée. Cette nouvelle étable expérimentale constitue un outil structurant pour préparer l’avenir de la filière veaux de boucherie et conserver son leadership mondial.
Continuent-elles à innover ?
La filière Veaux peut compter sur la capacité d’innovation de ses industriels, qui sont parfaitement en mesure de proposer aux points de vente des découpes et des produits élaborés, répondant aux attentes des consommateurs, quelle que soit la saison. L’initiative de la région Nouvelle Aquitaine qui travaille à la sensibilisation et à la formation des bouchers de GMS spécifiquement sur la viande de veau en est l’illustration. 2023 marque la fin des 4années du programme européen obtenu par INTERBEV, et ses homologues italiens, belges et néerlandais, pour promouvoir la viande de veau. La filière Veaux réfléchit actuellement à une nouvelle stratégie de communication, qui s’appuie sur la campagne collective “Aimez la viande, mangez-en mieux.” signée “Naturellement Flexitariens” portée par toutes les filières d’Interbev. Celle-ci doit permettre de créer un climat favorable pour le déploiement des programmes opérationnels des filières. Par ailleurs, Les volumes de veaux bio, à hauteur de 2 % de la production française connaissent une progression continue depuis plusieurs années mais l’évolution de la réglementation sur le BIO risque par ailleurs de freiner la progression des volumes.