Avec une créativité illimitée, le métavers présente des opportunités pour les marques et les distributeurs qui souhaitent répondre aux enjeux et besoins des consommateurs, en particulier les plus jeunes.
“Nous conseillons aux marques que l’on accompagne de tester le métavers rapidement dans des univers existants sur des univers de gaming ou sur des plateformes un peu plus open comme Decentraland ou the Sandbox où il y a déjà une audience. Il y a déjà un flux de people à qui s’adresser et sur lequel on peut tester des choses”, incite Valérie Piotte, directrice de l’agence Altavia Cosmic. Avec une approche test & learn, il peut être intéressant de partir du point de vente physique qui, “cela fait au moins 10 ans qu’on en parle, a un autre rôle à jouer. Pas uniquement un rôle marchand, mais un rôle d’expérience, de découverte, de divertissement, de rencontre. La réalité virtuelle peut y prendre une part intéressante comme premier test d’expérience à offrir aux clients”, ajoute-t-elle. Dans le même ordre d’idée, tout en étant prudent, créer l’événement autour d’un lancement de produit ou de collection en s’appuyant sur les NFT’s ou les direct to avatar (D2A) peut être intéressant pour susciter du buzz et de l’engagement, valider un concept ou un design. “Les univers des cosmétiques et du textile ont vraiment des opportunités à tester dès maintenant, puisqu’elles sont remises en cause aujourd’hui dans leurs écosystèmes et modèles économiques”, précise-t-elle.
“Je pense que cela va être aussi l’occasion de réfléchir à la manière dont chacun a envie d’exprimer sa proposition de valeur”, analyse Nathan Stern, directeur des études d’Altavia Shoppermind. Une marque comme Dyson, va sans doute plutôt se projeter dans un univers futuriste, très design et tech’ “dans une forme de célébration de la perfection technologique et du style. À l’inverse, une marque comme Lush jouera plus probablement sur un environnement d’authenticité et d’inclusivité. Les normes sociales et morales de ces deux métavers potentiels seront donc différentes. Je crois que la fidélité à l’ADN de sa marque, à sa proposition de valeur va vraiment faire la différence entre ceux qui se parachuteront dans le métavers parce que cela fait bien d’y être et ceux qui se poseront la question de la cohérence avec leur mission, leur raison d’être. Jouer sur le statut ou le buzz ne suffira pas”, ajoute-t-il.
1. Créer de l’engagement
Le premier enjeu pour les marques est de s’atteler à convaincre et à créer de l’engagement et du lien avec les jeunes, la nouvelle génération de consommateurs. “Autant les moins de 18 ans, nous commençons à être un peu vieux, on ne sait pas vraiment ce que recouvre cet univers virtuel. On ne se sait pas si demain on continuera à faire du shopping de façon classique ou si l’on se convertira au métavers. Les moins de 18 ans, eux, ne se posent aucune question. Ils sont déjà immergés. Ils ont déjà pris l’habitude de passer un certain nombre d’heures à se divertir, à retrouver leurs amis, virtuels ou réels, sur les plateformes de gamin. C’est déjà leur monde. Donc si une marque, une enseigne, veut créer du lien avec cette cible-là – et l’on sait qu’elle est complexe à comprendre aujourd’hui dans ses attentes -, le métavers est sans doute une bonne opportunité de les engager. Même si, aujourd’hui, la cible est assez niche, plutôt tournée vers les gamers, les fans de tech’ et les geeks qui ont déjà décrypté toutes les cryptomonnaies et savent exactement comment jouer avec, néanmoins, il est clair et évident que la future génération de consommateurs sera déjà éduquée à cet univers de demain. Donc, travailler les codes, essayer de communiquer et de créer du lien, est une superbe opportunité pour les marques”, analyse Valérie Piotte.
2. Inventer de nouvelles expériences d’achat pour le e-commerce
“Le e-commerce a ses limites. Il est efficace, rapide, il y a énormément d’offres, mais on n’y prend aucun plaisir. En plus, tous les sites se ressemblent. Demain, pour émerger, les marques ou les enseignes, vont devoir inventer une nouvelle expérience et se différencier par rapport à leurs concurrents. Le métavers ouvre un champ des possibilités infini pour imaginer des expériences nouvelles”, estime-t-elle.
3. Garder une connexion avec la réalité
Dans un commerce résolument omnicanal, le métavers se présente comme un nouveau point de contact marchand. “Mais il ne doit pas être déconnecté de la réalité”, prévient Valérie Piotte. Les marques devront, sans doute, inventer de nouveaux modèles économiques liés au métavers. Par exemple, on peut imaginer tester des produits dans le virtuel avant de les lancer (ou non) dans la vie réelle si cela fonctionne. C’est ce que propose, notamment, The Fabricant, une maison de couture hollandaise exclusivement numérique, pionnière de la mode virtuelle, qui travaille en partenariat avec des marques comme Adidas, Tommy Hilfiger ou Napapijri. Puma s’est associé à The Fabricant pour explorer des technologies plus durables afin de lancer sa collection capsule à faible impact Day Zero. Les images des campagnes produites par The Fabricant étaient 100 % numériques, éliminant le besoin d’échantillonnage, de manutention, de transport et de la logistique. Globalement, Puma a réduit le délai de mise sur le marché et atteint une rentabilité de 30 %. De quoi concevoir des collections en réduisant son impact sur l’environnement, offrir une tribune virtuelle aux produits numériques lors de défilés ou d’événements, capter un nouveau marché de vente dans le monde virtuel et, pour certaines marques, faire le lien avec le monde physique pour produire à la demande et/ou lancer des collections conçues dans le métavers.
4. Consommer moins, consommer mieux
“Si une partie de notre consommation se porte sur les produits numériques, peut-être cela va-t-il assouvir l’envie de certains achats d’impulsion dans la vie réelle. Peut-être que la fast fashion n’existera plus que dans le monde virtuel”, imagine Valérie Piotte. Autrement dit, profiter plutôt de l’usage du produit, plutôt que d’accumuler les possessions. Une tendance forte qui, elle aussi, a été exacerbée avec la crise sanitaire. “Cela va arriver très vite, un peu comme lorsque l’on est passé du CD à l’achat d’un abonnement de musique en ligne, souligne-t-elle. Il y a une certaine réalité où le numérique va remplacer le produit réel”.
5. Penser ultra-personnalisation
Le métavers peut également répondre aux besoins d’ultra-personnalisation des consommateurs. Puisqu’au-delà du produit, qui sera personnalisable à l’infini sans changer d’outils de fabrication, juste de design 3D, le commerce lui-même sera ultra personnalisé. On pourra créer un concept store virtuel rien que pour soi, avec les marques qui nous plaisent, les artistes, la culture et le divertissement qui nous parlent afin de créer un environnement très personnel dans lequel on invite ses amis, “où l’on devient un vrai ambassadeur et porte-parole des marques que l’on a invitées dans son espace personnalisé. C’est un peu le Graal aujourd’hui de toute marque et de toute enseigne d’apporter cette expérience au consommateur”, souligne Valérie Piotte.
6. Socialiser les expériences de shopping
Évidemment, l’idée n’est pas de naviguer seul dans cet univers virtuel. Au contraire, un des enjeux du métavers se situe dans le lien communautaire. “Et il existe de nombreuses possibilités de ‘gamifier’ les relations et de socialiser les expériences de shopping”, estime Nathan Stern. Pour éviter le cauchemar de l’essayage de vêtements en magasin, où la cabine est fermée pour cause de raison sanitaire, où l’on fait la queue, où l’on se trompe de taille et et l’on clopine en rayon pour tenter de trouver la bonne… Bref, c’est pénible et compliqué. Avec une modélisation 3D de sa morphologie et en quelques clics immersifs, on peut essayer tous les vêtements que l’on souhaite instantanément, convier ses amis à la séance d’essayage, obtenir des avis. “Potentiellement, une marque de vêtements ou une enseigne qui propose du prêt-à-porter, pourrait imaginer une expérience complète dans le métavers”, ajoute-t-il. Où accueillir de potentiels clients ? Sont-ils invités en solo, à 5, à 50 ? Est-ce qu’un avatar virtuel du fondateur serait pertinent pour interagir avec eux et leur expliquer la vision qui sous-tend la marque ? Est-ce que l’on propose à chacun de se forger une sorte de boudoir personnel, sur un mode très luxueux, dans lequel, en mode VIP, on lui propose des vêtements à lui faire essayer ? Est-il judicieux de prévoir une dimension livraison pour envoyer le produit dans un délai très court ? Peut-on prévoir des expériences hybrides pour ceux qui veulent “vraiment” essayer en magasin physique ? “Ce qui est troublant, c’est que les frontières entre ce qui est réel et virtuel vont vraiment se flouter. Aujourd’hui, on est atteint de cécité lorsque l’on évoque le monde physique et le monde du e-commerce. En fait, le e-commerce est très physique. Il y a des gens qui se déplacent pour nous livrer des produits. Depuis le début, on n’a jamais lâché le monde physique. Là, ça va peut-être être un peu plus compliqué”, souligne Nathan Stern.
ET APPRENDRE…
Concrètement, marques et enseignes vont se retrouver dans un environnement où l’on peut tout réinventer potentiellement, mais un monde où il y a tout à apprendre, pour tout le monde. “Donc, on va se planter, on va essuyer des plâtres, mais au fil de l’eau, on va petit à petit comprendre comment cela fonctionne et comment, bien au-delà de diffuser des produits ou des messages, l’on va devoir trouver des expressions de marque ou des services nouveaux à proposer qui vont vraiment être complètement inédits. Nul ne sait encore ce qui émergera dans ce foyer bouillonnant”, conclut-il.