R comme Réemploi, V comme Vrac, C pour Consigne

Afin de réduire le recours au plastique et de sortir du plastique à usage unique en 2040, les sujets du vrac et des emballages réemployables gagnent du terrain. C’est le 2e R du décret d’application de la loi Agec. La loi Agec, mise en place depuis 2020, a été renforcée par la loi Climat et Résilience en 2021. Les commerces de plus de 400 m2 devront consacrer 20 % de leur surface de vente de produits de grande consommation au vrac d’ici à 2030 (soit plus de 11 000 points de vente concernés selon Nielsen). Pour les commerces de moins de 400 m2, des expérimentations sont prévues pour les 3 prochaines années, notamment pour évaluer les modalités du déploiement. D’autre part, 5 % des emballages mis sur le marché en France devront être réemployés en 2023 (10 % en 2027). Clairement, enseignes et marques n’ont jamais autant réalisé de tests. Pour autant, quelles sont les solutions qui tiendront et passeront à l’échelle ? L’Institut du Commerce (IDC) alerte, ainsi, sur les fausses bonnes idées, à l’impact écologique négatif. Quelles sont les sources d’informations disponibles pour faire une Analyse de Cycle de Vie ? L’outil ACV est-il suffisant ? Dans quelles conditions le vrac et le réemploi ont-ils un impact environnemental et économique positif ? Les consommateurs sont-ils prêts à ramener des contenants en magasin ? Comment éviter les effets rebonds ou les transferts d’impacts vers le gaspillage, vers des contenants secondaires non recyclables ? Un guide du vrac Dès 2018, l’IDC a démarré ses travaux sur l’économie circulaire. En 2021, l’Institut a travaillé avec Réseau Vrac et un panel d’experts de l’économie circulaire, du parcours d’achat et de la logistique retour, des marques et des enseignes (ESSCA, FM Logistic, Galec, Mission Capital Clients, L’Oréal, Nestlé, Petrel…) afin de consigner, dans un guide pédagogique sur le vrac, les choix stratégiques et opérationnels que les acteurs du commerce doivent prendre face aux enjeux écologiques, économiques et réglementaires. Il s’agit, par exemple, d’intégrer l’écoconception dans tous les processus de l’entreprise, de former et impliquer toutes les parties prenantes, de repenser en profondeur les principes du marketing en cohérence avec les enjeux de l’économie circulaire, de concevoir un parcours d’achat encourageant les consommateurs à se tourner vers le vrac et les contenants réemployables ou encore construire de nouveaux business models pour accompagner la transition. Le guide insiste, également sur la nécessaire mutualisation de la logistique retour (collecte, transport, stockage, achat d’équipement…) et le choix d’un modèle d’organisation du nettoyage et re-remplissage des contenants. Clarté des prix Comme le souligne Emilie Chalvignac, directrice des opérations à l’IDC, “il sera nécessaire d’assurer la clarté de la politique tarifaire via la visibilité du prix de vente du produit et du prix de la consigne. Le consommateur souhaite légitimement que le produit vendu préemballé ou en vrac soit au même prix, voire moins cher que son équivalent préemballé à usage unique. Il ne doit pas sentir qu’il fait les frais des expérimentations des enseignes et des marques”. Elle insiste, également, sur la nécessité de garantir qu’à travers la politique tarifaire omnicanale, il existe une cohérence de prix pour l’achat écoresponsable par rapport aux produits conventionnels, souvent promotionnés. “Il faudra, aussi, veiller à ce que le prix de vente du produit et le prix de vente de la consigne soient visibles et compréhensibles. Il faut éviter de tomber dans les pièges du greenwashing”, ajoute-t-elle. De son côté, Jean-Philippe Glain, chef de groupe RSE – Galec, insiste sur les enjeux importants en matière de maîtrise de la responsabilité sanitaire : “Le vrac est sujet aux risques spécifiques que l’ensemble de la chaîne de production et de valeur va devoir mettre sous contrôle, notamment en points de vente. Les acteurs vont devoir s’assurer, notamment, que de bonnes pratiques d’hygiène et de maintenance sur les structures et les contenants sont mises en place afin de bannir tout développement microbiologique, de réduire les risques allergènes.” Il s’agira, aussi, de s’assurer de la compatibilité entre les contenants et le contenu proposé afin de pouvoir remonter toute la chaîne en cas de retrait/rappel de produits. “La garantie de traçabilité est donc un prérequis indispensable”, précise-t-il. Enfin, il faudra repenser différemment la communication avec les consommateurs, notamment sur les sujets de composition des produits, les précautions d’emploi, labels et autres allégations. Mutualiser la logistique retour Parmi les autres recommandations figurent l’organisation et la mutualisation de la logistique retour sur la base de plusieurs règles. “Il faut d’abord s’appuyer sur des flux logistiques existants afin de concevoir une boucle circulaire écologiquement responsable, économiquement viable et pratique sur le terrain”, souligne Hugues Pelletier, fondateur et CEO de Petrel. Parmi les bonnes pratiques, il cite la massification des flux, des hubs urbains partagés ou encore la consolidation des flux de retour dès le 1er km. “On peut aussi mutualiser de façon omnicanale, mais aussi entre différentes marques, ou encore en mixant flux BtoB et BtoC qui, en matière de retour peuvent se coordonner”, précise-t-il. Evidemment, il sera nécessaire de déployer un réseau de points de collecte, de casiers urbains, de magasins. “Il faut organiser la ramasse et adapter sa fréquence en fonction des volumes et des capacités de stockage au niveau du point de collecte et de la capacité de transport. Il faudra, aussi, construire le modèle du nettoyage et du remplissage, soit pour les consignes, soit dans le cadre du vrac”, ajoute-t-il. Sans oublier les essentiels outils de traçabilité et de suivi des flux.