Impactée par la fermeture des frontières et l’interdiction de voyager dans le monde, la filiale du groupe Lagardère prépare la rentrée du tourisme international en repensant son offre – spécialement en Chine – et en misant sur le digital.
Comment les activités de Lagardère Travel Retail résistent-elles à la crise ?
Les points de vente en aéroports ont été bien plus impactés par l’arrêt du trafic que ne l’ont été ceux dans les gares, où nous avons un réseau important de boutiques “Travel Essentials” comme Relay. Un certain nombre ont d’ailleurs prouvé la nature essentielle de leurs services aux voyageurs en restant ouverts, au plus fort de la crise. Le segment du convenience est donc celui qui a montré la plus grande résilience à la crise. Alors que la reprise du trafic s’amorce partout dans le monde, nous nous attachons particulièrement à continuer de proposer aux voyageurs des expériences uniques, que seul le travel
retail sait offrir, et à renforcer l’attractivité de notre offre, par une politique de prix compétitive et en proposant des gammes, locales et authentiques, qu’on ne trouve nulle part ailleurs. L’adaptation de notre offre et de nos produits à des profils de passagers plus domestiques et régionaux a été un autre point d’attention.
Les attentes des consommateurs ont-elles évolué ces 18 derniers mois ?
Bien qu’il soit encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur l’évolution des comportements de nos clients, nous assistons plutôt jusqu’à présent à une certaine permanence, très rassurante, de leurs attentes. Je ne pense pas que nous verrons émerger des tendances complètement nouvelles, mais les tendances antérieures à la crise vont sans aucun doute s’accélérer. Par exemple, l’attention portée par les clients à la responsabilité et la durabilité des produits que nous vendons, leur quête d’authenticité et d’exclusivité, le souhait de voir leur expérience en magasin simplifiée par l’introduction d’outils digitaux.
Quelles sont les nouveautés mises en place par Lagardère Travel Retail ces deux dernières années ?
Notre attention s’est principalement portée sur l’amélioration de nos concepts et de nos offres existantes, afin de toujours mieux répondre aux attentes de nos clients, de simplifier et de sécuriser leur parcours d’achat. La période a néanmoins été propice à l’innovation : nos équipes ont fait preuve d’une immense créativité pour maintenir nos ventes, quand la plupart des magasins étaient fermés. On a ainsi mis en place des ventes en live via les médias sociaux, développé des distributeurs automatiques pour les produits phares du duty free ou encore accéléré l’émergence de points de vente mobiles (le Triporteur Relay en est un exemple). En termes de campagnes, chaque région a développé des actions ciblées pour répondre au contexte. En Europe par exemple, le focus a été fait sur les passagers domestiques/Schengen et nous avons adapté notre offre en mettant en avant les “Best-Sellers” auprès de cette population (c’est la campagne “Best-Sellers at the best prices”) et nous avons multiplié les offres promotionnelles et les réductions.
Nous avons également introduit un concept nouvelle génération chez Relay, qui simplifie le parcours client, le rend plus lisible et plus proche de nos clients, et travaillons sur des concepts de magasins plus écologiques, de l’offre jusqu’au
mobilier.
Enfin, nous avons encore davantage différencié notre offre, en introduisant plus de concepts et de gammes de produits locaux. Cela a été fait aussi bien dans nos points de vente existants que dans les points de vente ouverts récemment ou dont l’ouverture est imminente : au Chili, au Pérou, en Tanzanie notamment.
Quels sont les grands axes de Lagardère pour le travel retail de demain ?
La diversification de notre organisation, aussi bien d’un point de vue géographique qu’en termes d’activités et de canaux, a été la clé de voûte de notre réussite avant la crise, et de notre résilience pendant la crise. Elle est au cœur de notre modèle et nos projets de développement stratégique y sont parfaitement alignés. Nous prévoyons ainsi de continuer à nous implanter dans des régions où le trafic régional est dynamique et offre des belles perspectives de croissance, comme l’Amérique Latine où nous avons fait nos premiers pas cette année, ou l’Afrique.
La Chine offre aussi des perspectives de développement très solides. Nos ventes dans ce pays sont supérieures de 90 % à ce qu’elles étaient l’année dernière. Ce succès est largement lié à la sophistication croissante des consommateurs chinois, et à une demande domestique qui explose dans un contexte de fermeture des frontières internationales.
Notre stratégie est donc de poursuivre un développement sélectif mais dynamique, en continuant toujours d’améliorer l’expérience d’achat que nous proposons dans nos magasins. Pour bien répondre aux besoins des voyageurs en travel retail, il est essentiel de maîtriser tous les différents types d’offres et nous maximisons notre portefeuille de marques et de concepts qui couvre les magasins du convenience jusqu’à la mode de luxe, les restaurants et les duty free. En intervenant
sur tous ces secteurs d’activité, et nous sommes les seuls à le faire, nous avons aussi la possibilité de développer des formats et des services hybrides.
Quelle est la stratégie du groupe sur le on-line ?
Le partenariat stratégique que nous avons formé avec JD.com va accélérer la transformation digitale de nos activités en Chine et en Asie du Nord et nous permettre aussi de sophistiquer notre gestion de la chaîne logistique. C’est une très belle alliance, dont nous attendons beaucoup, mais nous ne la croyons pas pour autant réplicable à l’identique ailleurs dans le monde, la Chine restant un marché très spécifique. Nous sommes cependant toujours ouverts à de nouveaux partenariats qui peuvent nous permettre de mieux répondre aux attentes de nos clients. Plus largement sur le digital, nous ne voyons pas à l’échelle du Groupe le e-commerce comme un concurrent ni comme un canal sur lequel nous devons nous développer. Le digital est un outil essentiel pour nous permettre de mieux répondre aux attentes de nos clients, des concédants et des marques. Mais nous croyons que le travel retail reste un très important – et peut-être le dernier – bastion du commerce physique, celui où les clients peuvent vivre des expériences uniques et les marques le mieux mettre en avant leur ADN. Notre volonté est donc de mettre les outils digitaux au service du commerce physique afin d’améliorer les expériences d’achats, et pas l’inverse.