Bousculé par la crise sanitaire et économique, traversé par une crise identitaire, le secteur de la publicité est en train de faire peau neuve. Mises au défi par la montée en puissance du digital, agences et marques doivent faire preuve d’imagination et d’agilité pour s’adapter à un contexte inédit, tout comme aux attentes, renforcées, des consommateurs, sur des discours de marques plus engagés et responsables. Plus que jamais, la publicité doit assumer son rôle d’agitateur social.
Par Cécile Buffard
Une anecdote. En janvier dernier, Ryanair s’est attiré les foudres de l’autorité britannique de régulation de la publicité (ASA). Motif ? La compagnie aérienne a lancé une campagne encourageant les Britanniques vaccinés contre le coronavirus à voyager à bord de ses avions, sous le slogan “jab and go” (vaccinez, partez). Tollé outre-Manche. L’Asa a déclaré avoir reçu pas moins de 2 370 plaintes concernant cette publicité, jugée trompeuse et irresponsable – si ce n’est pousse-au-crime – par ses détracteurs et en a ordonné le retrait. Cet exemple parmi d’autres illustre le dilemme dans lequel sont plongées les marques depuis 11 mois : l’incapacité à se projeter dans l’avenir et le besoin d’exister en continuant à communiquer avec leurs clients. “Le secteur traverse un moment exceptionnel pendant lequel les consommateurs ne se sont pas détournés des marques mais, au contraire, ont redoublé d’exigence envers elles et ont développé des attentes très fortes sur leur prise de position au cœur de la crise”, indique Thomas Jamet, CEO d’IPG Mediabrands France et vice-président de l’Union des Entreprises de conseil et d’Achat Media (Udecam). Confinement(s) et couvre-feu obligent, notre temps passé devant les écrans a explosé. En 2020, la durée d’écoute quotidienne de la télévision des Français, SVOD inclus (plateforme de vidéo par abonnement) a atteint 3 h 58, soit 18 minutes de plus qu’en 2019. Un record historique, selon Médiamétrie. Cette hausse concerne tous les publics, mais en premier lieu les CSP+ qui ont passé 34 minutes de plus chaque jour devant la TV et les jeunes de 15 à 34 ans (+14 minutes). Même constat sur le mobile. Le rapport annuel du spécialiste mondial des applications mobiles App Annie, intitulé The State of Mobile 2021, révèle que le marché a connu l’équivalent d’une croissance de 2 à 3 ans en seulement 12 mois. En France, nous avons passé près de 3 heures par jour sur notre smartphone (Android), contre 2,4 heures en 2019, et téléchargé 2,15 milliards d’applications mobiles, pour environ 1,7 Md€. Le top 5 des applications sur lesquelles les utilisateurs ont passé le plus de temps sur Android sont les sites marchands Vinted, AliExpress, Leboncoin, Amazon et Shein. Avec une moyenne mondiale de 4 heures et 10 minutes pendant la pandémie, le temps passé quotidiennement sur mobile a augmenté globalement de 20 % entre 2019 et 2020.
Résilience de l’e-publicité Le consommateur ainsi assigné à domicile, les yeux rivés sur son mobile ou son ordinateur, il n’est pas étonnant que les recettes de publicité digitale, en dépit d’un climat de récession, aient progressé. Le 25e Observatoire de l’e-pub publié par le SRI et l’Udecam, avec le cabinet Oliver Wyman, annonce une année 2020 à double détente, marquée par une importante baisse au premier semestre (-8 %) suivie d’un regain de vigueur au second semestre, à +13 %, enregistrant plus de 6 M€. Dans le détail, le Search (42 % des recettes) est en hausse de 3 %, poussé par le Retail Search (+ 32%) qui représente désormais 10 % du Search. Le Social est moins impacté que les autres leviers au premier semestre et confirme sa dynamique face à la crise avec une belle progression +7 % sur l’année. Son poids progresse légèrement à 26 % (1 558 M€). Le Display (19 % du