Dans la course à la Présidentielle, le Conseil du Commerce de France porte la voix des commerces français auprès des candidats déclarés et expose les chantiers prioritaires d’un secteur qui a besoin du soutien de l’État pour réussir sa transformation.
Si la guerre en Ukraine occupe nos esprits, il ne faut pas, pour autant, que l’actualité vienne chasser les sujets structurants. En juillet 2021, le Conseil du Commerce de France (CdCF), qui compte plus de 30 fédérations adhérentes, avait invité l’ensemble de ses membres à réfléchir sur un Pacte du Commerce qui formaliserait une série de propositions pour réussir la transformation du commerce en France. Ce travail a été présenté aux Assises du commerce organisées sous la houlette du ministère de l’Économie, en décembre dernier et il sera la base des échanges avec les candidats déclarés à l’élection présidentielle, auxquels le Conseil a demandé audience. “Nous avons souhaité proposer des éléments qui ont vocation à venir alimenter la réflexion des candidats. Nous pensons qu’il est essentiel que le commerce compte dans cette campagne. Depuis deux ans et demi, soit la moitié du quinquennat, il résiste, il s’engage, il s’implique dans le cadre de la crise sanitaire pour apporter des solutions en proximité, tous secteurs confondus. Les commerçants doivent être entendus dans le cadre de cette campagne et au-delà, devront être accompagnés dans leur transformation. Le commerce de demain sera omnicanal, écoresponsable et innovant. Les commerçants qui sont le cœur de vitalité de nos territoires, attendent des propositions concrètes. C’est le sens de ce pacte, qui pourra nourrir les projets respectifs des candidats”, affirme William Koeberlé, président du CdCF. Ce pacte repose sur trois piliers :
1. Soutenir la digitalisation et le développement écoresponsable du commerce
Pour aider les commerçants à se transformer et investir dans les outils numériques, il faut libérer la pression fiscale et administrative qui pèse sur eux (soit une centaine de taxes directes et indirectes). Cinq pistes sont envisagées : la réduction du poids des impôts de production, le soutien aux investissements numériques, logistiques et écoresponsables de tous les commerçants via un mécanisme de crédit d’impôt ou de suramortissement accéléré, valable sur l’imposition des bénéfices ou autres impôts tels que la Tascom ; la création d’un livret “transformation numérique des entreprises” destiné à orienter une partie de l’épargne de Français vers le financement de la transformation digitale des commerces ; le développement de solutions logistiques locales et mutualisées ; l’engagement des commerçants dans un développement écoresponsable pour réduire l’empreinte carbone des commerces et accompagner les clients dans une consommation plus durable.
“Pour avoir un commerce qui reste compétitif à l’international, nous avons besoin d’une aide de l’État pour aller plus loin dans l’omnicanalité des commerces et la modernisation des outils mais également pour investir dans la transition écologique qui représente un tiers des investissements communément réalisés dans le retail”, souligne William Koeberlé.
2. Développer les compétences des commerçants et maintenir la dynamique de l’emploi dans les territoires
Alors que le commerce emploi 3,6 millions d’hommes et de femmes, le CdCF demande un soutien au développement des compétences et à l’embauche. Il propose de pérenniser l’aide exceptionnelle du plan “1 jeune 1 solution” pour le recrutement des apprentis et alternants en contrat de professionnalisation, d’encourager l’embauche du premier salarié grâce à une prime à l’embauche et/ou une exonération des charges sociales pendant trois ans, de lutter contre l’ubérisation et la précarisation des emplois, de réfléchir au maintien dans l’emploi des séniors et de libéraliser l’ouverture des magasins le dimanche et en soirée (sous réserve d’accord social avec les syndicats). Le Pacte pour le Commerce suggère également d’aider les entreprises à financer la formation de leurs collaborateurs en orientant une plus grande partie des fonds de la formation professionnelle vers des plans de développement des compétences des entreprises du commerce, d’exonérer de charges sociales les heures de formation des salariés réalisée au titre de la reconversion ou de la promotion par l’alternance. Enfin, il souhaite développer des diagnostics numériques des commerces et la formation des commerçants en abondant les fonds des OPCO.
“En tant que premier employeur du secteur privé, le commerce possède une représentation réelle sur le territoire. Malheureusement, les élus ne se souviennent de nous qu’en période de crise ! Pourtant, cette année porte un changement fondamental comparé aux précédentes élections, avec l’accélération du e-commerce pendant la pandémie, au niveau mondial. Nous demandons donc aux gouvernements de donner aux commerçants les moyens de rester dans la compétition face aux pure players à travers une équité fiscale et un allègement des charges sociales. Avec internet, le commerce est devenu une activité délocalisable, agissons pour qu’il soit capable d’être présent dans le jeu concurrentiel”, déclare William Koeberlé.
3. Permettre au commerce d’être apporteur de solutions pour la vitalité des territoires
Pour permettre aux commerces de retrouver leur place dans les territoires, le Pacte pour le Commerce veut rassembler toutes les synergies : faciliter la logistique et les flux de produits et de personnes et moderniser les locaux commerciaux.
Le Pacte veut engager une réforme de la fiscalité locale pour réduire les charges sur les magasins physiques et instaurer une équité fiscale entre tous les canaux de distribution, faciliter les changements de destination des locaux commerciaux en simplifiant les procédures administratives, notamment la revente de locaux vacants, encourager les projets de restructuration à mètres carrés constants grâce à des mesures de compensation ou en supprimant d’autres surfaces commerciales.
Engagé dans la non-artificialisation des sols, le CdCF incite à la réutilisation des friches et demande la réalisation d’un inventaire de ces parcelles, mis à disposition de toutes les parties prenantes. Il réclame aussi une fiscalité incitative à la réutilisation des friches, prévoyant par exemple l’exonération de la taxe d’aménagement et de la taxe foncière pendant 5 ans. Il entend favoriser la transformation de mètres carrés commerciaux obsolètes et énergivores grâce à une prime à la conversion.
Par ailleurs, le Cdcf souhaite encourager les partenariats publics/privés pour adapter les territoires aux nouveaux modes de consommation, dans le cadre d’une ville plus durable, créer, pour la rénovation des locaux commerciaux, un dispositif similaire à la loi Pinel sur le logement, faciliter l’accès des produits et des clients en centre-ville et aux zones commerciales, en associant systématiquement les commerçants aux décisions de piétonisation ou de création de zones à trafic limité. Enfin, il propose de déployer massivement les managers de territoire.
“À l’heure où les questions de souveraineté industrielle et alimentaire reviennent au cœur du débat politique, le principe de territorialisation du commerce, que nous portons, prend tout son sens. Les changements de comportements de consommations, tels que l’essor de la seconde main sont à prendre en compte. Il faut travailler en amont et réorganiser le commerce en fonction de ces nouveaux éléments. Le commerce fait partie de la ville, il s’intègre dans le tourisme, la culture, les services à la personne. Pour cela, nous avons besoin d’un manager de territoire pour coordonner le projet d’accompagnement au changement au niveau local”, préconise William Koeberlé.