Après deux années de crise sanitaire, les centres commerciaux retrouvent, en moyenne, des niveaux de fréquentation presque comparables à 2019. Signe que la reprise est bien là ? Si les effets de la pandémie se sont estompés, d’autres facteurs déstabilisateurs – l’inflation, la hausse des prix des matières premières et de l’énergie, la remontée des taux – viennent assombrir le tableau. De nouveaux défis attendent le commerce qui, jusque-là, a démontré sa résilience, redonnant de la superbe à un actif retail injustement boudé par les investisseurs. PAR CÉCILE BUFFARD
La saison s’annonce belle. Après deux années de pandémie, des fermetures à répétition, les centres commerciaux ont démarré l’année 2022 sous de meilleurs auspices et l’actif retail retrouve (enfin) de sa superbe. Pour combien de temps ? Difficile d’établir des pronostics tant le climat économique, géopolitique et sanitaire est trouble, et les perspectives incertaines. Une chose est sûre, le bilan du premier semestre fait état d’un élan de reprise, annonciateur d’une sortie de crise. Les opérateurs, en tout cas, sont optimistes. La lumière au bout du tunnel ? Même si elle n’a pas retrouvé son niveau de 2019, la fréquentation des centres commerciaux a progressé de près de 70 % au premier trimestre 2022, comparé à la même période en 2021, avec un flux établi à -17 %. Les consommateurs retrouvent, peu à peu, le chemin des grands ensembles commerciaux et renouent avec leurs habitudes de shopping d’avant la pandémie. “Le commerce physique a bien résisté à la crise et les craintes provoquées par l’explosion du e-commerce pendant la crise sanitaire ne se sont pas concrétisées, les deux canaux fonctionnant en complémentarité. Les centres commerciaux continuent d’incarner, pour les consommateurs, des lieux de vie où ils ont plaisir à se retrouver”, constate Antoine Grignon, co-directeur du département Investissement chez Knight Frank France. Il faut dire qu’après la crise des gilets de jaunes, les mouvements de grève contre la réforme des retraites entre 2018 et 2019, le commerce a connu des années noires qui ont fait fuir les investisseurs de cette classe d’actifs. La crise Covid a changé la donne en mettant en lumière les commerces de proximité et les enseignes alimentaires dont l’activité s’est montrée très résiliente au plus fort de la crise. En 2022, le retail redevient attractif alors que la levée du pass sanitaire et la fin du port du masque ont facilité le retour des visiteurs dans les grands centres commerciaux. Les transactions reprennent, également, signe d’un rebond du marché.
Fin du retail bashing
Si les volumes d’investissement ont été faibles en 2021, notamment marqués par le coup d’arrêt sur les transactions de pieds d’immeubles (elles représentent, d’ordinaire, 2 Mds€ par an), le marché s’est accéléré en fin d’année. Aux portefeuilles vendus en sale and leaseback (Cora/Match, Casino/Monoprix, Grand Frais, Decathlon) s’est ajoutée l’opération majeure de revente de 45 % de Carré Sénart par Unibail à Cardif-Sogecap pour 450 M€ : un vrai marqueur de reprise. “C’est la fin du retail bashing. Les investisseurs institutionnels qui étaient réticents à acheter des actifs de commerce, de peur que les loyers dégringolent, reviennent sur le marché. La collecte des SCPI repart à la hausse, preuve que le retail est redevenu une classe d’actifs intéressante pour les investisseurs en quête de diversification et de rendements”, ajoute Antoine Grignon. Et pour cause, là où le résidentiel, le bureau et la logistique plafonnent, au mieux, à 3 %, les actifs de commerce peuvent rapporter plus de 5 % de rendement. Les centres commerciaux ont en effet démontré leur capacité de renouvellement en affinant leurs concepts en diversifiant leur modèle économique