Alors que le secteur des jeux et jouets s’engage dans une démarche écoresponsable, les acteurs du marché se mettent au vert et développent des offres de seconde main et de recyclage. C’est notamment le cas de King Jouet qui a lancé, au printemps dernier, son nouveau concept King’Ocaz, dédié aux produits d’occasion.
Conjoncture: le marché à l’épreuve de l’inflation
Le marché des jeux et jouets se prépare pour son moment clé du calendrier et s’attend à un Noël normal malgré un environnement tendu. En effet, comme chaque année, Noël devrait faire figure d’échappatoire dans un quotidien marqué par les tensions géopolitiques, les hausses de prix et la menace du retour de la crise sanitaire, assure The NPD Group. Depuis 2021, année record où les ventes ont dépassé 3,8 Md€, la France est devenue le premier marché du jouet en Europe et compte bien le rester. Mais cette année, les acteurs du marché doivent faire face en particulier au défi de l’inflation. “Le pouvoir d’achat des ménages est très tendu en cette fin d’année et cela se reflète aussi dans nos chiffres qui montrent une hausse contenue de 6 % des prix sur le marché des jeux et jouets pour le mois d’août. Cette augmentation qui est totalement en ligne avec l’ensemble des prix à la consommation rapporté par l’INSEE, est très inférieure à l’inflation constatée sur l’ensemble des Produits de Grande Consommation. La France est par ailleurs le pays en Europe où l’inflation des jouets reste la plus limitée par rapport à ses voisins Allemands +6,6 % ou Britanniques +6,8 %”, commente Frédérique Tutt, Global Industry Expert Jouet chez The NPD Group.
Une saison tardive
À mi-septembre, le chiffre d’affaires du secteur du jouet en France est en léger recul de 0,8 % par rapport à 2021 mais affiche une croissance de 5 % par rapport à 2019 – l’année de référence pré-Covid – et reflète un certain retour à la normale. Ces résultats sont même meilleurs que ceux des pays voisins moins protégés par le bouclier tarifaire énergétique. En effet, les marchés anglais et allemand affichent respectivement des baisses de 4 % et 5 % par rapport à 2021. Autre signe rassurant pour le marché : la croissance de ventes chez les spécialistes. “On observe une progression de 5 % des ventes depuis le début de l’année dans les magasins des enseignes spécialisées, un vrai vote de confiance des consommateurs qui recherchent non seulement des prix attractifs mais aussi du conseil et un large choix”, indique Philippe Gueydon, co-président de la FCJPE. “Cette performance est d’autant plus remarquable que le secteur a connu de fortes turbulences depuis quelques années, ainsi qu’une rationalisation de son parc. Les chiffres NPD montrent qu’à magasins constants, les ventes ont progressé de 9 % par rapport à 2019”, ajoute-t-il.
Cette année, The NPD Group, La FJP & la FCJPE s’attendent à une saison tardive, Noël tombant un dimanche en plein milieu des vacances scolaires ce qui pourrait pousser les consommateurs à différer leurs achats de jouets à la dernière minute comme cela avait été le cas en 2016. Décembre représente un tiers du chiffre d’affaires annuel du secteur, un moment clé à ne pas manquer, surtout lorsqu’il offre, comme cette année, plus de latitude à ceux qui profiteront du début des vacances pour finir leurs achats. Frédérique Tutt conclut : “Le jouet reste un secteur très stable et un investissement relativement minime pour le consommateur qui va délivrer des heures et parfois même des années de jeu pour toute la famille. Cette année, les Français vont devoir faire des arbitrages au vu des contraintes conjoncturelles mais ils vont s’attacher à protéger l’esprit de Noël. C’est pourquoi, comme en 2020 et 2021, le marché des jeux et jouets devrait prouver encore une fois sa résilience.”
Responsabilité élargie des producteurs
De nombreuses entreprises du secteur ont engagé de manière volontaire des démarches d’économie circulaire depuis plusieurs années, notamment en augmentant la part des produits éco-conçus dans leur offre. L’année 2022 marque une étape majeure pour la filière jeu/jouet en faveur du développement durable. En effet, dans le cadre de la REP (Responsabilité Élargie des Producteurs) portée par la loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) les fabricants et les distributeurs concernés financent désormais la collecte des jouets usagés ou en fin de vie (via une écocontribution) afin d’en assurer leur traitement, à travers notamment le réemploi et le recyclage. La filière a fait le choix de l’éco-organisme Eco-mobilier pour la mise en place et la gestion de cette filière REP, dont le rôle est d’organiser le réemploi de ces jouets, en encourageant le don, de développer des filières de recyclage, mais aussi de promouvoir l’éco-conception. “Un enjeu fort de la Responsabilité Élargie des Producteurs pour la filière est de concilier ces exigences environnementales avec les exigences de sécurité propres au secteur et de trouver un équilibre entre elles”, détaille Florent Leroux, président de la FJP.
Les premiers bacs de collecte de jouets seront disponibles dès la fin de l’année dans des magasins tests et le déploiement national se fera progressivement en 2023. Selon l’étude Future of Toys du groupe NPD, réalisée en juin dernier, 41 % des consommateurs français ont déjà recyclé leurs anciens jouets au moins une fois. Les professionnels du secteur se sont fixé pour objectif qu’un tiers des jouets mis sur le marché devront être annuellement collectés (soit environ 33 000 tonnes) à des fins de réemploi, recyclage ou valorisation. Près de 20 % de ces tonnes collectées devront être à terme réemployées, notamment par des structures de l’économie sociale et solidaire.
Nouveau concept King’Okaz, l’offre de seconde main de King Jouet
L’enseigne King Jouet a lancé au printemps dernier King’Okaz, un nouveau concept de magasin de jouets neufs et d’occasion à St-Marcel-Lès-Valence. Avec son offre de seconde main, le spécialiste isérois des jeux et jouets souhaite apporter une réponse aux problématiques de pouvoir d’achat et sensibiliser les enfants à l’écoresponsabilité dès le plus jeune âge. Les enfants peuvent ainsi faire le tri dans leurs jouets et ramener chez King’Okaz ceux qu’ils n’utilisent plus pour leur donner une seconde vie. En échange, le magasin leur remet des bons d’achats d’un montant correspondant à la valeur des jouets repris, qu’ils peuvent utiliser à leur guise chez King Jouet pendant un an. Le premier King’Okaz ayant rencontré le succès attendu et profitant de la conversion des 85 magasins Maxi Toys à la suite du rachat par King jouet en 2020, six autres points de vente ont été ouverts à Lens, Niort, Mâcon, Cambrai, Clay-Souilly et Ollioules.
Le jouet fait sa mue écologique
Depuis une dizaine d’années, le marché de la seconde main s’est fortement accéléré en France, aussi bien du côté des enseignes que des consommateurs, et d’autant plus avec la crise sanitaire. 54 % des Français ont déjà acheté un jouet de seconde main, soucieux de limiter les quelque 75 000 jouets jetés tous les ans dans les poubelles françaises. “Très consommateur de plastique et avec un approvisionnement provenant majoritairement d’Asie, le secteur des jeux et jouets est historiquement un mauvais élève en matière d’écoresponsabilité. King Jouet a voulu reprendre le sujet en main en renouvelant son offre de produits. En deux ans, la part de jouets écoresponsables, fabriqués en matériaux recyclables ou en bois issu de forêts à gestion responsable a été multipliée par deux, pour atteindre 15 % à 20 % de l’assortiment selon les arrivages”, explique Patrick Jocteur Monrozier, directeur du pôle clients de King Jouets. Les trois quarts de l’offre seront donc des produits neufs, offrant ainsi le choix et une alternative de seconde main aux consommateurs, tout au long du parcours en magasin. Les jouets d’occasion, rachetés un tiers de leur valeur sont revendus en magasin à 50 % de leur prix, d’où la nécessité de jouer sur les volumes. Les magasins King’Okaz s’installent, par conséquent, sur d’importantes surfaces, autour de 900 m2. L’enseigne a également poussé le curseur loin en matière de circuits courts et locaux, jusqu’à présenter un tiers de jouets Made in France dans ses magasins, quand le marché plafonne à 14 % et favorise les circuits courts. “Nous avons lancé un service de pièces détachées sur notre site internet pour renforcer la durabilité de nos produits. 1 500 pièces détachées sont aujourd’hui référencées”, indique-t-il.
Normes de sécurité et d’hygiène
Le jouet devant impérativement répondre à des normes d’hygiène et de sécurité – les doudous, par exemple, sont exclus de la reprise – l’enseigne sélectionne les produits, contrôle leur bon fonctionnement, les nettoie et les reconditionne parfois. Les jouets rapportés avec leur emballage nécessitent seulement un ré-étiquetage, d’autres sont présentés dans un sac Kraft.
Ils sont ensuite remis en rayon et commercialisés avec une garantie de douze mois. Les jouets de premier âge, les Lego, poupées et figurines restent, pour l’heure, les produits qui tirent le mieux leur épingle du jeu. L’enseigne va connaître cette année sa première période de Noël : “C’est le moment de l’année où les parents ont le plus besoin de pouvoir d’achat et de trouver des jouets moins chers”, souligne Patrick Jocteur Monrozier. L’accueil de jouets d’occasion est plutôt bon auprès des enfants. Même si la liste de Noël reste sacrée et que certains produits, à l’image des licences, sont liés à l’actualité, l’offre de seconde main permet aux parents de surprendre les enfants tout au long de l’année, dans une logique désaisonnalisée. “Pour qu’un produit parte, il faut que l’offre rencontre la demande”, note le directeur. Cela a été le cas pour un vaisseau Lego Stars Wars daté de l’an passé : en quelques jours, il a trouvé preneur et fait le bonheur de son nouveau petit propriétaire.