A quelques jours des fêtes de fin d’année, les tentations d’acheter sont nombreuses, incitées par des campagnes de promotions agressives. Mais cela a-t-il encore du sens à l’heure où la planète brûle de trop consommer des produits dont on n’a pas forcement besoin ? Il est toujours possible d’inverser la tendance et de privilégier les actes d’achats responsables, sans pour autant être intégriste. Consommer mieux devient tendance.
Le mois de décembre est un moment à part dans l’année. Climax de la consommation, avec sa débauche de promotions dont le Black Friday donne le coup d’envoi dès la fin novembre, des cadeaux anticipés et d’achats à prix cassés en tout genre. Les fêtes de fin d’années représentent, pour les commerçants, une parenthèse enchantée où il est enfin permis de dépenser sans compter, pour ses proches, ses amis, la famille. Bien que récemment importé des Etats-Unis, l’événement Black Friday a pris rapidement racines en France : en six ans, le volume de transactions réalisées en ligne durant cette journée de rabais a progressé de 465%. Au total, près de 6 milliards d’euros aurait été dépensés le week-end du 29 novembre au 2 décembre. Un succès qui souligne, par ailleurs, l’irrésistible ascension du e-commerce avec ses vitrines ouvertes 24/24h, 7 jour sur 7, notamment 50% des français ont acheté en ligne ce jour-là. Cette logique de surenchère promotionnelle porte tout de même à réfléchir car casser fortement les prix dévalorise la notion de « juste prix » du produit le reste de l’année.
« Casser fortement les prix dévalorise la notion de « juste prix » du produit le reste de l’année »
En témoigne, ces marques qui s’opposent à l’hyperconsommation. Elles sont près de 700 (Nature et Découvertes, Naturalia ou Camif) à s’être engagées dans des initiatives volontaires collectives ou individuelles telles que “Make Friday Green Again » ou « Green Friday ». Leur mantra ? Dire stop au gaspillage, à la consommation irraisonnée et aux modes de production destructeurs pour la planète. Des entreprises disruptives qui s’opposent à la surconsommation en doublant les prix pour le Black Friday, comme la marque suédoise Haglofs, reversant la totalité des revenus de cette journée à des associations environnementalistes. Nature et Découvertes a ainsi instauré le “Fair Friday”, une journée de sensibilisation à la disparition de la biodiversité qui s’est traduite par des ateliers sur les oiseaux organisés en magasin, des promotions de -20% sur les mangeoires et un arrondi doublé au profit la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO). En ligne, la Camif a également fermé sa plateforme e-commerce ce jour-là pour mieux sensibiliser ses clients en magasin. Si le succès commercial du Black Friday ne se dément pas, s’y opposer est une opportunité pour les marques de se différencier intelligemment pour améliorer leur image et attirer le consommateur responsable.
Fêter Noël de façon responsable
Aussi, fêter Noël de façon responsable est possible. Le budget moyen des ménages dédié aux fêtes de fin d’années avoisinera les 550 euros cette année. Cette somme sera répartie entre l’alimentaire (environ 130 euros pour les repas de fête) et 350 euros de cadeaux pour ses proches. Symbolique, le présent que l’on s’offre à Noël demeure un vecteur fort de lien social. Celui-ci n’est pas voué à disparaître mais il peut être désormais choisi pour son impact social et environnemental. Les marques de textile ou de maroquinerie qui utilisent des matériaux recyclables voire vegan, les solutions visant à supprimer l’usage du plastique ou encore, les objets qui racontent l’histoire d’un savoir-faire ou d’une matière sont autant d’exemple de cadeaux utiles qui durent et qui s’inscrivent dans une prise de conscience des consommateurs de leur acte d’achat.
« Les fêtes de fin d’année sont une opportunité pour réfléchir au sens que l’on donne à sa consommation »
Sur nos tables, le concept du repas de Noël fait maison, conçu à base de légumes du jardin ou à partir d’aliments peu transformés, locaux et de saison, fait son chemin, confirmant la volonté de nombreux Français d’avoir une industrie agroalimentaire plus soucieuse de l’environnement et de la qualité dans nos assiettes. Enfin, Noël est aussi le moment de mettre le holà aux suremballages et d’adopter un comportement en cohérence avec la règlementation sur les emballages plastiques. En effet, à quoi bon aller acheter ses aliments en vrac toute l’année avec ses contenants réutilisables si, le 24 décembre, il s’agit de sur-emballer tous les cadeaux ? L’industrie du luxe y réfléchit en tentant de limiter ses suremballages. De quoi faire germer l’idée d’une fête avec des cadeaux en vrac. De la sorte, Noël deviendrait le moment privilégié des pratiques vertueuses qui participent à la construction d’un avenir meilleur pour les hommes et la planète.
L’usage, plus que le produit
Si les marques ont renforcé leurs engagements en faveur d’une consommation plus responsable, c’est aussi par ce qu’elles rencontrent une nouvelle caisse de résonnance auprès des Français. Sous l’impulsion des générations futures, la prise de conscience des défis écologiques, de la surconsommation et du matérialisme à tout crin se fait plus forte et visible. Bien qu’elle ne se reflète pas (encore) dans les chiffres de ventes de tous les secteurs de consommation, elle se manifeste aujourd’hui par un report des achats sur les produits de « communication, de loisirs et culturels » au détriment de l’habillement ou l’alimentation, notamment. Sous le règne de Netflix et de Deezer, louer plutôt que d’acheter est devenu une pratique en vigueur, en accord avec les valeurs d’une économie de la fonctionnalité, immatérielles donc non périssables. Consommer moins mais mieux, tel est le slogan qui peu à peu s’installe dans l’esprit des consommateurs. A quelques jours du passage à 2020, en plein mouvement de grève des Français, l’une des revendications est de gagner en pouvoir d’achat : pour plus ou mieux consommer ? La prochaine décennie nous le confirmera.
Par Marc Jacouton, fondateur de RSE développement