Ce qu’il en reste

La loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, a été promulguée le 6?août dernier (loi n°2015-990), à la suite de la décision du Conseil constitutionnel qui en a validé l’essentiel du contenu. Son article?31, issu d’un amendement parlementaire déposé par le député François Brottes, introduit dans le Code de commerce de nouvelles dispositions sur les réseaux de distribution commerciale, plus particulièrement dans les relations contractuelles entre les réseaux et les commerces de détail. L’amendement initial tel que figurant dans le projet de loi adopté par l’Assemblée Nationale en février dernier prévoyait, entre autres, une durée maximale de 9 ans pour l’ensemble des contrats conclus entre la tête d’un réseau commercial (franchiseur ou coopérative) et toute personne exploitant un magasin de commerce de détail ainsi que l’interdiction de toute clause de non-concurrence post contractuelle. Cet amendement s’inspirait de travaux parlementaires antérieurs et de l’avis rendu par l’Autorité de la concurrence le 7?décembre 2010 relatif au secteur de la distribution alimentaire. Dans cet avis, l’Autorité, après avoir rappelé le degré élevé de concentration (avec 6 enseignes représentant 85% du marché français), pointait du doigt les clauses et restrictions imposées par les dites enseignes à l’égard de leurs franchisés et adhérents ayant pour effet de les empêcher de quitter leur réseau et renforçant les barrières à l’entrée d’autres acteurs. L’adoption de l’amendement déposé par le député Brottes, en février dernier, a entraîné une levée de boucliers de la part des têtes de réseaux, en particulier des réseaux coopératifs. Leurs principaux arguments étaient les suivants: la fixation d’une limite à la durée contractuelle aurait un effet dissuasif sur la réalisation et le financement d’investissements de long terme (tels que logistiques). L’interdiction de toute clause de non-concurrence post-contractuelle mettrait en danger les réseaux de franchise et la préservation de leur savoir-faire, au détriment des franchisés restant fidèles au réseau. Enfin, la distribution alimentaire, en France, présente des caractéristiques qui ne se retrouveraient pas dans d’autres secteurs de distribution au détail et une disposition générale faisant abstraction du pouvoir de marché des enseignes serait, par conséquent, inadaptée.Devant l’émoi suscité par l’adoption de cet amendement, le texte final de la loi Macron marque un recul, en supprimant notamment la limitation générale de 9 ans. Le gouvernement s’est finalement rendu compte que cette disposition aurait été à la fois inadéquate (dans la mesure où les investissements réalisés par les franchiseurs et franchisés s’amortissent sur une durée souvent plus longue que 9 ans) et inutile, dans la mesure où le droit français, tout comme le droit communautaire, contient déjà des limitations aux restrictions verticales. Ce qui demeure dans le texte final de la loi Macron se résume à deux points: • Le contrat principal (franchise ou affiliation) et tous les contrats accessoires (par exemple, approvisionnement, référencement, etc.) doivent avoir une échéance commune. La résiliation de l’un de ces contrats entraîne la résiliation de tous les autres contrats liés, l’objectif étant d’éviter que les franchisés ou adhérents restent tenus indéfiniment ou sur une durée particulièrement longue, au titre de contrats multiples. Ce principe ne s’applique pas au contrat de bail, qui est soumis au régime spécifique des baux commerciaux et ce, quelle que soit l’identité du bailleur (franchiseur ou tiers). Par ailleurs, cette disposition de la loi Macron ne s’applique pas aux coopératives de commerçants, qui ont réussi à faire valoir leurs spécificités par rapport aux réseaux intégrés et franchisés; • Par principe, les clauses de non-concurrence et de non-réaffiliation post contractuelles sont désormais interdites. Par dérogation, elles demeurent valables si les 4 conditions suivantes sont remplies cumulativement: (i) elles concernent des biens ou services contractuels, (ii) elles sont limitées aux terrains et locaux à partir desquels l’exploitant a exercé son activité pendant la durée du contrat, (iii) elles sont indispensables à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat et (iv) leur durée n’excède pas un an après l’échéance ou la résiliation du contrat. Ces nouvelles conditions restreignent davantage que par le passé la licéité des clauses de non-concurrence post contractuelles dans les contrats de franchise; en effet, la jurisprudence avait jusqu’à présent tendance à accepter des clauses d’une durée plus longue, dès lors qu’elles étaient proportionnées aux intérêts en présence et nécessaires à la préservation de l’intégrité du réseau. Les nouvelles dispositions mentionnées ci-dessus s’appliqueront à compter du 6?août 2016. À propos de Aramis Le cabinet regroupe vingt avocats, dont 8 associés spécialisés dans des matières qui recouvrent une très large palette des besoins des entreprises françaises et internationales : distribution et consommation, concurrence, droit social, douanes, fi scalité, monétique et e-paiements, procédures collectives, technologies de l’information, restructurations, fusions / acquisitions, marchés de capitaux...

Loi Macron