À l’épreuve de la réglementation bancaire

Sous l’impulsion du droit européen, l’octroi de licences de prestataires de services de paiement s’est démocratisé. En contrepartie, les régulateurs bancaires sont de plus en plus insistants pour exiger la mise en conformité des acteurs qui relèvent de cette réglementation. L’objectif poursuivi par cette réglementation est double. D’une part, assurer la protection des consommateurs par des règles prudentielles qui garantissent une meilleure solidité financière et un contrôle régulier du régulateur, ce qui réduit le risque de disparition des avoirs des clients en cas de faillite. D’autre part, lutter contre le blanchiment de capitaux en imposant aux acteurs agréés des obligations de connaissance de leurs clients. Analyse de l’activité L’ACPR a détaillé dans sa Revue n°21 son analyse de l’activité des marketplaces.Lorsque la place de marché effectue une opération de vente pour le compte de vendeurs tiers, elle collecte les paiements des clients sur un compte bancaire ouvert en son nom, et reverse les fonds aux vendeurs moyennant, généralement, le prélèvement d’une commission. L’ACPR qualifie ce mécanisme d’“encaissement de fonds pour compte de tiers” qui implique la fourniture de deux services de paiement: l’acquisition d’ordres de paiement et l’exécution d’opérations de virement associées à la gestion d’un compte de paiement. Ces activités relèvent du régime des services de paiement et nécessitent un agrément d’établissement de paiement.Le fait que ces services ne constituent qu’un accessoire de l’activité de la marketplace ne fait pas obstacle à l’application de cette réglementation. Lors d’une conférence donnée fin 2014, le régulateur a indiqué avoir adressé à plusieurs places de marché des demandes officielles de mise en conformité dont le non-respect est passible de sanctions pénales.Les solutions L’encaissement de fonds pour le compte de tiers est réservé aux établissements agréés, sous réserve de certaines exceptions. • Agrément d’établissement de paiementDans la typologie des agréments bancaires, c’est, en principe, l’agrément le plus “souple”. Il nécessite un capital minimum de 125?000?euros, qui peut toutefois être supérieur pour respecter des ratios de fonds propres qui doivent être proportionnés au volume d’activité. Plusieurs procédures doivent également être mises en place: procédure de contrôle interne et externe, reporting envers le régulateur, procédures de lutte contre le blanchiment. Un agrément peut généralement être délivré en 9 à 12 mois. • Les exceptions légalesPour les marketplaces qui ne peuvent ou ne souhaitent pas solliciter un agrément, les cas d’exonération prévus par la loi sont limités. Elle prévoit que, par exception, les services de paiement peuvent être fournis sans agrément, notamment pour les agents commerciaux et les réseaux de franchise. La Commission européenne et l’ACPR ont, cependant, exclu les places de marché du statut d’agents commerciaux dans la mesure où elles interviennent en tant qu’intermédiaires entre le vendeur et l’acheteur, et non comme agent d’une des parties. Les places de marché sont également exclues de la qualification du réseau de franchise, la majorité des réseaux de vendeurs existants ne répondant pas aux critères de la franchise. • Demande d’exemptionLes marketplaces qui n’offrent qu’un éventail limité de biens ou de services ou qui mettent en place un réseau limité de vendeurs sont éligibles à une exemption d’agrément. Le bénéfice de cette exemption implique le dépôt d’une demande formelle auprès de l’ACPR, qui apprécie le respect des critères de manière stricte. La Commission européenne a rappelé que l’exemption fondée sur le “réseau limité” est incompatible avec un réseau de vendeurs qui a vocation à s’étendre. En revanche, le régulateur a accordé des exemptions à des places de marché dont l’offre était restreinte à certains produits ou services précis, donnant une connotation thématique à la marketplace. L’instruction d’un dossier d’exemption dure environ 6 mois. L’ACPR peut soumettre l’octroi de l’exemption au respect de conditions, telles que le respect de procédures de contrôle interne ou la tenue d’une comptabilité distincte pour les activités de paiement.• Le recours à un sponsorIl existe, enfin, une solution plus originale issue de la pratique anglo-saxonne: la possibilité de “louer” l’agrément d’un établissement agréé, dans le cadre d’un contrat de “sponsor”. Celui-ci se substitue, juridiquement et financièrement, à la marketplace et reçoit les fonds dont il est légalement responsable. D’un point de vue marketing, en revanche, c’est bien la marketplace qui reste en première ligne à l’égard des clients. Ce schéma a le mérite d’être souple à mettre en place; il présente l’inconvénient de priver la marketplace des flux financiers et de la gestion de trésorerie qui constituent, souvent, une partie de son business model. Alternativement, la marketplace peut conserver la gestion des flux financiers: elle rentre, alors, dans le régime réglementé d’agent de service de paiement. Ce régime nécessite des démarches auprès du régulateur mais reste plus “léger” qu’un agrément de plein exercice. À propos de Aramis Le cabinet regroupe vingt avocats, dont 8 associés spécialisés dans des matières qui recouvrent une très large palette des besoins des entreprises françaises et internationales : distribution et consommation, concurrence, droit social, douanes, fiscalité, monétique et e-paiements, procédures collectives, technologies de l’information, restructurations, fusions / acquisitions, marchés de capitaux...

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