
À l’initiative de la France, plusieurs États membres appellent la Commission européenne à lutter contre un « risque systémique » concernant les plateformes de e-commerce.
« Nous sommes dans un far-west numérique et nous avons le devoir, au niveau européen, de nous protéger », a lancé Serge Papin, ministre du commerce à son arrivée à Bruxelles le lundi 8 décembre. A l’occasion du Conseil de compétitivité européen, la France a réussi à inscrire à l’ordre du jour la lutte contre le « risque systémique » que font porter les plateformes de e-commerce au marché européen. C’est ainsi que 8 Etats membres (Autriche, Belgique, Espagne, France, Grèce, Hongrie, Italie et Pologne) on fait parvenir à la Commission européenne un courrier commun l’appelant à renforcer l’application du droit européen et à lutter plus efficacement contre les risques liés aux plateformes de e-commerce. Un courrier qui fait suite à la réunion des ministres européens du Commerce organisée par la France le 27 novembre dernier en visioconférence. « Certaines plateformes de e-commerce bafouent les règles européennes et mettent en danger nos consommateurs, nos commerces, nos entreprises et notre planète. Or ce que nous dénonçons en France, nos voisins européens le subissent également chez eux. Nous sommes huit ministres européens à porter aujourd’hui cette voie pour une plus grande fermeté à l’égard des plateformes de e-commerce – j’en suis fier. Notre demande à la Commission européenne est sans équivoque : enquêtes systématiques, sanction immédiate et application stricte de notre réglementation européenne », a ajouté Serge Papin à l’issue de la réunion qui a rappelé que 600 avions arrivent tous les jours en Europe pour livrer 4,5 milliards de colis de ces plateformes.
Coordination renforcée des contrôles
Dans ce courrier, les Etats signataires proposent une coordination renforcée des contrôles opéré par les États membres en matière douanière, de surveillance du marché et de protection des consommateurs. D’autre part, ils demandent que la Commission européenne joue un rôle actif face aux plateformes de e-commerce et utilise pleinement les leviers à sa disposition pour faire respecter les législations existantes, en particulier le DSA. Ils appellent aussi la Commission européenne à « mettre en place des mesures d’atténuation réelles des risques systémiques portés par les plateformes ». Enfin, il propose la révision des réglementations existantes et, si nécessaire, le renforcement des obligations des plateformes en ligne pour atténuer ces risques.
Dans son préambule, Serge Papin avait rappelé qu’avec des infractions récurrentes, certaines plateformes de e-commerce démontraient « leur incapacité à maîtriser les risques systémiques, comme l’exige le DSA ». Le ministre du commerce a également souligné qu’il « est nécessaire d’ouvrir rapidement une procédure d’enquête à l’encontre de Shein qui doit être complétée par des mesures provisoires pour atténuer les risques systémiques non maîtrisées par Shein et par d’autres plateformes. Des sanctions supplémentaires doivent être aussi envisagées dans les procédures déjà lancées contre Temu et AliExpress. Une action européenne est également indispensable ».
Shein : la décision attendue le 19 décembre
D’autre part, dans le cadre de la procédure judiciaire à l’encontre de Shein, l’état réitère sa demande de blocage du site et de mesures de contrôle. Pour rappel, à la suite des graves manquements de Shein, le gouvernement, à la demande du Premier ministre, a lancé une procédure de blocage temporaire de la plateforme, par voie d’assignation devant le Tribunal judiciaire de Paris, « afin de faire cesser les graves dommages à l’ordre public causés par les défaillances répétées de la plateforme ».
L’audience s’est tenue le vendredi 5 décembre et la décision a été mise en délibéré au 19 décembre.
« Au regard des risques systémiques du fonctionnement et du modèle de Shein », l’état confirme sa demande de blocage du site pour une durée de 3 mois, ou à minima le maintien de la suspension de sa marketplace. L’Etat a par ailleurs a demandé à ce que ces mesures ne puissent être levées qu’à la condition de la mise en œuvre de moyens techniques réellement efficaces visant à prévenir la vente de tout produit illicite. L’effectivité de ces mesures de contrôle, de catégorisation des produits, ainsi que de l’instauration d’un dispositif de filtrage des publics mineurs serait placée sous le contrôle de l’Arcom.
C.B.
