Face à l’épidémie de coronavirus, une grande partie des commerces ont dû fermer leurs portes, mais les achats en lignes, eux, restent autorisés et se multiplient. L’occasion pour le secteur de la livraison à domicile d’opérer une véritable mue pour assurer un service client efficace et à la hauteur des nouveaux enjeux de notre société.
Réception des colis à domicile : la grande oubliée du e-commerce
Nul doute que le secteur du e-commerce est en constante progression. En effet, cette année le cap historique des 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires a été dépassé. Les consommateurs sont devenus des e-acheteurs multipliant les revenus du e-commerce par 100 en 20 ans[1]. Une bonne nouvelle pour les sites marchands qui sont néanmoins contraints de mener une course effrénée pour satisfaire un consommateur toujours plus exigeant de la commande à la livraison. Et c’est aujourd’hui sur la livraison que tous les projecteurs sont braqués.
Car même si les parties prenantes se gardent de communiquer des chiffres officiels sur l’échec de la réception des colis, en 2018, ce ne sont pourtant pas moins de 20 millions de colis qui ont dû être distribués une seconde fois ou récupérés par les clients dans un point relais[2].
Mais au final, peu importent les chiffres : pas besoin d’un fort taux d’échec sur la réception de colis pour que celle-ci soit perçue comme une plaie par le consommateur. Bien que la plupart des petits colis puissent atterrir directement dans les boîtes aux lettres (si ces dernières sont normalisées), il suffit qu’un anorak n’arrive pas à temps pour que les vacances d’hiver soient gâchées et que le consommateur considère sa démarche d’achat comme un véritable échec.
L’importance du dernier kilomètre pour l’image de marque…
80 % des consommateurs préfèrent se faire livrer à domicile et n’ont que faire de savoir si le colis a été remis à l’heure au centre de tri ou du nombre de kilomètres qu’il a parcouru[3]. Leur seul point d’attention est sa livraison, en lieu et en heure prévus. Le dernier kilomètre représente donc une étape décisive, aussi importante que l’acte d’achat en lui-même. Lorsque tout ne se passe pas comme prévu, c’est directement vers l’e-commerçant qu’ils se tournent. Au-delà d’une grande insatisfaction, ils risquent non seulement de ne plus passer commande auprès du site e-commerce, mais également de le déconseiller à leur entourage – ou pire encore, de partager leur mauvaise expérience sur les réseaux sociaux. L’enseigne souffre alors d’une réputation dégradée, et peut in fine perdre une partie de sa clientèle.
… et pour le transporteur
Outre le fait de décevoir l’utilisateur final et d’abîmer l’image de marque de l’enseigne, les difficultés rencontrées lors de la réception ont des conséquences néfastes pour le transporteur. En une seule livraison ratée, le cumul des pertes du transporteur et de celles de son prestataire local peuvent représenter la marge réalisée en trois à cinq livraisons réussies[4].
Alors que les consommateurs accusent la marque, cette dernière rejette la responsabilité sur les transporteurs (Chronopost, UPS, FedEx, etc.) qui, à leur tour, incriminent les entreprises sous-traitantes auxquelles ils font appel. Mais si personne n’est vraiment responsable de l’échec d’une livraison, comment résoudre ce problème ?
Dans l’équation d’une livraison parfaite, l’inconnue demeure la présence du destinataire à son domicile pour réceptionner le colis. La priorité est donc de trouver un moyen efficace, économique et sécurisé pour assurer la réception du colis, même en l’absence de son récipiendaire.
Une réception de colis dépersonnifiée : la clé ?
Dans ce contexte, il est tentant de penser que la solution idéale est d’avoir un gardien dans l’immeuble capable de récupérer les colis des habitants. Cependant, moins de 11%[5] des logements français disposent à ce jour de gardiens ou concierges. Et ces derniers n’ont pas vocation à distribuer les colis, tâche qui les détourne de leurs principales missions de surveillance, d’accueil, de nettoyage ou encore d’information auprès des résidents.
Face à l’impossibilité de garantir la présence de l’utilisateur final à son domicile, de nombreuses solutions se développent pour résoudre la problématique du dernier kilomètre. Outre-Atlantique comme en France, par exemple, des tests sont réalisés pour installer des serrures connectées qui permettraient au livreur de déposer directement le colis dans les logements. Solution coûteuse, elle reste à l’état de test pour le moment et semble encore loin d’être acceptable par les usagers à grande échelle…
Améliorer la réception du colis peut également passer par l’installation d’une infrastructure qui permet de déposer le colis même en l’absence du consommateur. C’est ce que proposent les casiers Amazon Locker, points de retrait automatiques exclusifs à la marque, permettant à ses clients de récupérer leurs commandes en libre-service, aux horaires d’ouvertures des sites sur lesquels ils sont installés.
Au niveau du lieu de vie enfin, de nouvelles solutions tendent également à « dépersonnifier » la réception du colis. Ces infrastructures sécurisées et collaboratives, jouant le rôle de concierges automatiques, réceptionnent les colis à l’instar des boîtes aux lettres qui réceptionnent le courrier. Elles peuvent également servir de points de dépôt à domicile pour l’envoi de colis, en particulier dans le cas de la logistique retour des articles, si précieuse au secteur de la mode. L’utilisateur final n’a alors plus besoin d’être présent au domicile pour s’y faire livrer, ni besoin de se déplacer pour retourner un article. En période d’épidémie ou de confinement qui plus est, ces dernières permettent une livraison « sans contact », indispensable à la sécurité des opérateurs comme des clients sur l’ensemble des territoires touchés.
Alors que la chaîne logistique de la livraison de colis e-commerce ne cesse d’évoluer et de se perfectionner, la fluidité du dernier kilomètre reste incertaine au moment de la réception du colis par son récipiendaire. Étape décisive, cette dernière va grandement influencer la satisfaction des consommateurs, mais également, et souvent par rebond, l’image, le chiffre d’affaires ainsi que la marge des e-commerçants et transporteurs. Dépersonnifier la réception des colis pourrait, dans l’idéal, permettre à l’utilisateur final, non seulement de recevoir ses colis chez lui lorsqu’il n’y est pas, mais également de les renvoyer sans avoir à se déplacer, grâce à une infrastructure dédiée sur son lieu de vie. De quoi faciliter grandement son quotidien
Par Adrien Oksman, co-fondateur de Boks