Sur le web, un contrôle des promos limité

• Peut-on parler d’un probable contournement de la loi? Quand une offre déloyale touche le prix de vente d’un produit, on parle de tromperie. Vente-privée a répondu qu’ils étaient dans leur droit. Et ils n’ont pas tort. Depuis mars2015, la notion de prix de référence renvoie à une pratique d’affichage de prix amélioré ou bonifié qui doit être accompagné d’un prix de référence à partir duquel la réduction du prix est calculée. Or, ce texte ne définit pas de manière coercitive la façon dont doit être annoncé ledit prix de référence et insiste même sur la liberté de détermination de celui-ci, couramment pratiqué et constaté auprès des autres enseignes. En effet, le système ayant été très coercitif par le passé, la France a été conduite à modifier la loi pour se conformer au droit européen. Le vendeur doit prouver que le gain proposé au consommateur est réel. • Ce texte n’est-il pas dépassé? Disons que ce système de contrôle a été mis en place quand le e-commerce était en cours de développement, à une époque où le système référentiel de prix était plus simple. Les prix sont, de fait, plus faciles à déterminer dans un point de vente physique que sur Internet, tant la volatilité des prix est grande. Cette démarche de l’administration n’est pas une première. Lorsqu’elle a décidé d’ouvrir la notion prix de référence, elle a annoncé, qu’en contrepartie, elle effectuerait des contrôles plus sévères sur les prix. Dans son bilan d’acticité 2016, la DGCCRF a pointé une vingtaine de sites dont Zalando et Amazon, sur des pratiques de fausses promotions avec des taux massifs d’au moins -50% pour des prix de référence illusoires. Amazon avait transigé avec l’administration et payé une amende dont le montant exact n’a pas été publié. Cela prouve néanmoins que la pression administrative sur des comportements massifs et perturbateurs du marché ne date pas d’aujourd’hui. Et elle a vocation à viser les gros acteurs pour que le marché se normalise. • Comment adapter la loi au numérique? Internet a cassé notre système de références intellectuel et nous oblige à en trouver de nouveaux. Mais la loi a du mal à aller aussi vite que la technologie. Dans un monde idéal, il pourrait y avoir de la place pour une soft law, avec des acteurs qui créeraient des références de prix acceptables. Il faut laisser le temps aux acteurs de se régulariser et que les leaders s’organisent. À défaut, que des associations de consommateurs publient des grilles de référence. Toute la difficulté, aujourd’hui est de réussir à caractériser rapidement des faits et légiférer sur des acteurs qui ne sont pas domiciliés en France. Il est facile de retrouver un produit dans un point de vente ou un entrepôt français puisque le droit national s’applique. Par contre, un site étranger n’est pas tenu aux réglementations françaises. Face à cela, nos retailers nationaux ne peuvent pas, non plus être pénalisés… La question n’est pas donc tant de définir des comportements mais d’adapter la loi à l’environnement numérique et rendre les pouvoirs publics et de contrôle plus efficaces à court terme. Il faut trouver des outils adaptés pour jauger la loyauté des offres sur Internet. C’est un challenge technique mais nécessaire. • Que va-t-il se passer pour Vente-privée? Le législateur a transmis le procès-verbal au procureur de Bobigny. Le parquet peut décider soit de classer l’affaire, soit d’engager des poursuites pénales à l’encontre de Vente-privée. La société peut encourir jusqu’à 1,50?M€ d’amende (l’amende peut toutefois être portée à 10% du chiffre d’affaires annuel de la société) et 50% des fonds engagés dans la compagne de communication à rembourser. Si cette affaire fait grand bruit, on ne remarque pas, pour autant, d’inflation de cas de tromperie sur Internet. La caisse de résonance est plus forte parce que des acteurs du web tels que Vente-privée ou Amazon sont des opérateurs tellement puissants qu’ils irriguent en communication et publicité un nombre de consommateurs bien supérieurs qu’à l’époque du papier. Souvenez-vous de la bataille autour des promotions sur le Nutella: ce sont les réseaux sociaux qui ont créé cet effet de foule… Et fait exploser les ventes de la marque?!

Sur le web, un contrôle des promos limité

Le cas Vente-Privée