Innovation. Le mot est sur toutes les lèvres. Quelle entreprise, aujourd’hui, de l’industrie agroalimentaire à la distribution, ne parle pas d’innovation? Nouveaux produits, concepts, modèles qui vont révolutionner le marché et changer les habitudes des consommateurs. Avec, à la clé, du chiffre d’affaires supplémentaire. En théorie, du moins. Car les résultats ne suivent pas toujours les promesses. En 2014 comme en 2013, en dépit d’une consommation relativement atone (0,2% entre juin et septembre, selon l’Insee) commerçants et industriels ont continué de miser sur la nouveauté. Un modèle chassant l’autre, à l’image du marché des smartphones, le plus innovant. Les industries agroalimentaires ne sont pas en reste. Le cabinet XTC World Innovation a expertisé plus de 1?700 nouveaux produits pour la dernière édition du SIAL. Soit plus du double d’il y a deux ans. Parmi ces innovations, beaucoup étaient françaises. “Depuis la crise des banques en 2008 qui a clairement provoqué, en 2009, un gel de tous les projets, l’innovation est en progression permanente”, souligne Xavier Terlet, président d’XTC. En progression, certes, mais néanmoins frileuse. Les industriels préférant multiplier les références que d’investir de nouveaux créneaux. Ce n’est pas faute, pourtant, d’évoquer les bienfaits de l’innovation disruptive. Cette fameuse théorie développée par l’autrichien Joseph Schumpeter, selon laquelle le processus de destruction créative stimule l’innovation et le progrès en remisant l’ancien au profit du neuf, est reprise, aujourd’hui par tous les économistes… Mais en pratique, les entreprises peinent à l’appliquer. “Il faut faire attention aux indicateurs: ils sont révélateurs de la quantité mais pas de la qualité de l’innovation sur le marché. En 2014, on parle surtout d’innovation facile car il n’y a pas de remise en question de la chaîne de production, pas de coûts de R&D importants, ni d’investissements dans de nouveaux types d’emballages”, explique Xavier Terlet. Être acteur du changement requiert des investissements financiers et humains. Or, à l’heure de la rationalisation des coûts, les entreprises réfléchissent à deux fois avant de déployer l’artillerie lourde. Et de plus en plus de retailers, notamment, privilégient le pragmatisme économique à l’innovation spectaculaire.
Fin de la course à l’armementExit les gadgets high-tech en magasin, la stratégie des enseignes donne l’avantage aux technologies ciblées, voire, invisibles. “On constate un retour en arrière par rapport à une pléthore d’outils très sophistiqués au profit d’un matériel digital beaucoup plus petit et ciblé. La course à l’armement est terminée”, observe Jean-Marc Mégnin, directeur général d’Altavia ShopperMind. Pour ce dernier, la vraie innovation se trouve dans le front office, en interface avec le client. Conscients que les clients voulaient tout sauf revivre une expérience digitale en magasin, les commerçants se tournent vers un digital plus intégré – pour exemple, La Halle aux chaussures a installé dans ses rayons des petites bornes pour commander les pointures manquantes – et surtout, très tourné vers l’usage. “De moins en moins d’enseignes ont envie de faire de l’innovation pour l’innovation mais toutes veulent que cela amène quelque chose de significatif”, note Hervé Grelet, responsable du retail chez Wincor Nixdorf. Pour rendre les clients plus heureux, d’abord, en améliorant leur expérience en magasin. En réduisant, d’abord, les files d’attente, l’un des deux points d’insatisfaction des consommateurs, avec les prix, selon un sondage IFOP. Loin devant le paiement mobile dont on parle tant. Uniqlo, à Paris, a commencé à développer la file d’attente unique, ainsi qu’une poignée d’hypermarchés Carrefour. Parallèlement à cela, les self check-out montent en puissance dans les enseignes non alimentaires, à l’instar de Décathlon. “Il ne s’agit pas là de se substituer aux caisses normales mais d’offrir aux clients une proposition supplémentaire”, souligne Hervé