2?°C. C’est le seuil fatidique. Et l’enjeu de la COP21 qui se tient à Paris du 30?novembre au 11?décembre. Objectif: contenir la hausse du réchauffement climatique en deçà de 2?°C par rapport à l’ère pré-industrielle – soit 1,5?°C de plus qu’actuellement – à l’horizon 2100. Un moindre mal car, même en suivant cette trajectoire, on n’évitera pas l’élévation du niveau des océans. Et “plus on s’éloigne de cet objectif, plus il sera difficile, voire impossible, d’adapter nos sociétés au réchauffement climatique”, prévient Jean Jouzel, climatologue, ex-vice-président du Giec, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat créé en 1988 par deux institutions des Nations unies. Au-delà de 2?°C, tous les voyants passent, en effet, au rouge avec une multiplication d’événements climatiques extrêmes: sécheresses à répétition, incendies, précipitations, fonte des glaces et du permafrost, élévation du niveau de la mer, réfugiés climatiques, salinisation des terres, acidification des océans… Un coût environnemental, humain et économique insoutenable. Pour tenir la trajectoire, une seule solution: réduire de façon drastique les émissions de gaz à effet de serre (GES). “Il y a une telle inertie dans les changements climatiques, qu’il faut que ces émissions commencent à redescendre dès 2020. C’est maintenant qu’il faut agir?!”, insiste Jean Jouzel. Concrètement, les GES ont augmenté de 80% depuis 1970, et de 30% depuis 1990 pour atteindre 49 Giga tonnes équivalent CO2 (GtCO2eq) en 2010. Si rien n’est fait, au rythme actuel des émissions mondiales (+2,2% par an), la hausse des températures moyennes devrait être comprise entre 3,7 et 4,8?°C d’ici à 2100. Bien loin de l’objectif. Pour limiter le réchauffement climatique à 2?°C, il faut diviser par 3 les émissions de GES (par 4 pour les pays développés) à l’horizon 2050 et parvenir à une neutralité carbone en 2100. Pour l’heure, “nous n’en sommes qu’à la moitié du chemin”, estime Jean Jouzel. Au regard des contributions émises par les Parties (les engagements des États signataires de la Convention climat) en amont de la COP21, le scénario penche, plutôt, pour un réchauffement moyen de 3?°C. Insuffisant. D’autant que les engagements ne portent que sur une période de 15 ans et sont souvent conditionnés à des variables de taux de croissance ou d’aides de financement. Une clause de révision tous les 5 ans est sur la table des négociations. C’est l’un des enjeux essentiels de la COP21 qui doit transformer les engagements pris, en 2009, lors de la Conférence de Copenhague, où les pays ont affirmé leur volonté de limiter le réchauffement climatique à 2?°C à la fin du siècle. Une COP21 qui doit trouver les moyens d’aboutir à “un accord universel conclu par tous et applicable par tous, à un accord ambitieux qui permette de rester sous les 2?°C et d’envoyer, ainsi, aux acteurs économiques, les signaux nécessaires pour engager la transition vers l’économie bas carbone, et un accord flexible, prenant en compte les situations, les spécificités, les besoins et les capacités de chaque pays, notamment les moins avancés et les petites îles”. De son côté, la France – qui, selon le site de la COP21, “compte parmi les pays industrialisés les moins émetteurs de GES avec 1,2% des émissions mondiales pour 4,2% du PIB mondial” – a adopté, en octobre2014, un projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, qui fixe des objectifs ambitieux à l’horizon 2030, notamment de réduire de 40% les émissions de GES (par rapport à 1990).
L’alimentation en première ligne Dans ce cadre, l’alimentation est un axe majeur dans la lutte contre les changements climatiques. En témoigne l’étude réalisée par le Bipe, pour le compte de la filière française des huiles et protéines végétales, sur l’évolution mondiale de notre alimentation et ses impacts sur le climat à l’horizon 2030. Elle a été présentée lors d’un débat organisé par le groupe Avril (acteur industriel et financier des filières françaises des huiles et protéines végétales – marques Lesieur, Puget, Matines…) et Carrefour sur le thème “Alimentation et Climat”. Les principales conclusions sont édifiantes. Dans le monde, l’alimentation est la source de 21% des émissions humaines de GES en 2014 (27% en France selon la Fondation GoodPlanet). C’est presque autant que l’énergie (30%) et plus que le transport et l’industrie. “Aujourd’hui, les produits animaux sont à l’origine de 85% des émissions liées à l’alimentation”, estime Éric Champarnaud, du Bipe. Avec, en première ligne, les ruminants. Si la viande bovine ne représente que 7% du volume des produits d’origine animale, elle est la source de 43%