On espérait une rentrée sous de meilleurs auspices. La reprise s’est faite plus timide que prévu et le virus Covid-19 continue de peser sur l’économie et la société en général. Bonne nouvelle, cependant, les consommateurs ont retrouvé le chemin des magasins. En juillet dernier, l’indice du Conseil National des Centres Commerciaux annonçait une performance de 93 % de leur chiffre d’affaires par rapport au même mois de 2019, après des chiffres de 40 % et 85 % pour les mois de mai et juin. En moyenne, la fréquentation des magasins, tous sites confondus, a connu une augmentation de + 2 % par rapport à août 2019. Le commerce spécialisé a progressé de 3 %, soit une activité comparable à celle de juillet. Cette dynamique s’est révélée particulièrement importante pour les magasins de sport (+ 17 %) et l’équipement de la maison (+ 14,4 %). La chaussure a même connu son meilleur mois depuis longtemps (+ 10 %) ! A contrario, l’alimentation spécialisée, le secteur de la beauté santé ont été grandement pénalisés (respectivement, à -9 % et 5,4 %). Deux poids, deux mesures.
Autre impact de la crise, la baisse durable de la consommation anticipée par EY dans la nouvelle édition de son baromètre Future Consumer Index. Fragilisés économiquement, les consommateurs privilégient ainsi l’accessibilité des prix, au profit des marques distributeurs et au détriment des marques traditionnelles. Selon l’étude, 58 % des Français prévoient d’être beaucoup plus attentifs à leurs dépenses générales et 54 % de chercher à économiser davantage. En outre, près de la moitié (47 %) compte diminuer la fréquence de ses courses et 31 % anticipent des modes de consommation plus frugaux (25 %) ou des coupes budgétaires importantes (6 %). Ces perspectives, tout comme l’évolution des critères d’achats, posent un défi important aux grandes marques qui risquent de perdre des parts de marché dans les mois à venir si elles n’effectuent pas un travail global sur le positionnement de leurs gammes, leur offre tarifaire, ou encore, leurs modes de distribution.
Si l’exercice est encore possible au sein des multinationales, et avec le soutien des aides gouvernementales, la situation s’avère bien plus complexe pour les commerçants de proximité. À en croire deux enquêtes réalisées en juillet et août dernier par American Express, en partenariat avec YouGov France, les professionnels déclarent avoir enregistré une baisse de 40 % de leur activité en moyenne depuis le début de la crise sanitaire. La moitié d’entre eux se disent inquiets pour l’avenir de leur entreprise et près des deux tiers (64 %) estiment ne pas avoir suffisamment de trésorerie pour tenir le coup si une deuxième vague de l’épidémie de Covid-19 et un reconfinement devaient survenir. Dans ce contexte tourmenté, le soutien des Français aux magasins de proximité est plus que jamais attendu. Tandis que près de 69 % des consommateurs affirment y être attachés, ces déclarations doivent se traduire en actes d’achat.
Et pour cause. La période post confinement continue d’être favorable au canal internet, alors que les mesures de distanciation pénalisent les magasins et en particulier certains grands lieux de commerce (grands centres commerciaux, grandes villes, gares…). Dans tous les secteurs, les ventes des enseignes sur le web connaissent de fortes croissances (+ 76 % en août, comparé à 2019 dans le commerce spécialisé), notamment grâce au click & collect. C’est bien légitime. Néanmoins, le besoin de garder ses distances ne doit toutefois pas nous faire oublier que la vie continue malgré le virus, que des milliers de TPE et PME – grandes absentes du plan de relance – ont besoin de notre mobilisation individuelle pour faire face aux vents contraires. Préférer le volontarisme à la peur est sans doute la meilleure marche à venir pour relancer collectivement l’économie de notre pays.
Francis Luzin, Directeur de la publication