Tout, en ce début d’année, annonçait une belle reprise pour le commerce. Passé le mois de janvier et une fois éloignés les risques liés au variant Omicron, les voyants étaient au vert pour renouer avec une croissance tant attendue. La fin du port du masque et du passe sanitaire, au printemps, rimaient alors avec un retour de la fréquentation dans les grands centres commerciaux. Alors que les beaux jours arrivaient, les consommateurs retrouvaient les allées de leur shopping center préféré, certains d’entre eux – les retail parks surtout – ont même enregistré leurs meilleurs résultats à la mi-année, depuis 2019. Oui mais. Cette dynamique a été enrayée par les conséquences économiques et logistiques de la guerre en Ukraine : une inflation galopante, des pénuries de matières premières, des prix de l’énergie qui explosent et un climat de tension et qui a plombé le sentiment de liberté et de légèreté retrouvé.
Malgré l’évidente résilience dont ont fait preuve les opérateurs, démontrant que le commerce savait résister à toutes les crises et mettant ainsi fin à la période (injuste) de “retail bashing” qui avait détourné une partie des investisseurs de cette typologie d’actifs au profit de la logistique ou du bureau, la prudence est de mise. La remontée des taux d’intérêts, le bond en avant de l’OAT 10 ans et les projections économiques annoncent de fortes turbulences sur les marchés financiers qui finiront par impacter l’économie réelle. Déjà, la consommation, au quotidien, est perturbée par le manque de certains produits de base (l’huile, la moutarde, bientôt le pain ou le beurre) mais surtout, la facture globale s’allonge et freine les intentions d’achat. La saison d’été des soldes qui vient de s’ouvrir reste incertaine : les Français profiteront-ils de ces rabais pour faire de bonnes affaires et s’offrir des produits qu’ils ne pourraient pas s’acheter au prix fort ? Ou, à l’inverse, préféreront-ils, comme ils le font depuis deux ans, jouer l’épargne de précaution en prévision de nouvelles hausses tarifaires (essence, gaz, électricité, etc.) à venir ? Nul ne le sait.
Dans cette zone d’incertitude où faire des prévisions relève presque de la prédiction, foncières et acteurs du commerce doivent continuer à avancer. Ébranlés par deux années de crise sanitaire, ils ont su réadapter leurs concepts aux nouvelles attentes de leurs clients, réorienter leur offre vers des objectifs plus socialement et écologiquement responsables. Ils ont capté l’air du temps, comprenant que le vivre ensemble comptait plus que le dépenser sans compter, qu’au lieu d’être des lieux de commerce, ils devaient incarner des lieux d’accueil, de retrouvailles, d’animation et de convivialité. Un glissement du matériel vers l’immatériel pour recréer les conditions du désir d’acheter et du laisser-aller aux petits plaisirs. C’est une remise en question pour ces grands centres qui endossent aujourd’hui le rôle d’animateurs de quartier plutôt que de simples outils commerciaux. Mais également, une nécessaire réflexion pour prétendre encore à attirer un public de moins en moins consommateur et de plus en plus acteur. L’ère du commerce social (et non du “social commerce”, sur Internet) a commencé.
D’ici là, bonnes
vacances,
et rendez-vous
le 5 septembre !
Directeur de la publication : Francis Luzin