On les appelle les irritants. Tous ces sujets qui agacent les consommateurs. Ruptures en linéaire, attente en caisse, magasins moins bien organisés, mal tenus, voire sales, retard de livraisons, accueil désagréable, vendeurs mal informés, informations prix erronées… Des insatisfactions encore plus exacerbées sous l’effet des crises qui se succèdent. D’ailleurs, en cette période d’inflation et de contraction du pouvoir d’achat, les vraies/fausses promotions ou le phénomène de shrinkflation font encore plus grincer les dents des consommateurs qui ont l’impression d’être roulés dans la farine. Avec, à la clé, une perte d’image et une rentabilité égratignée du côté des distributeurs qui, souvent, manquent de personnel et peinent à recruter.
Derrière les taux de rupture en linéaire se cachent, ainsi, des problématiques durables de ressources en magasin et des difficultés d’approvisionnement des industriels. Avec des marchés hyper segmentés, beaucoup de produits ne « tournent » que très peu en termes de performance. Dans ce contexte, le temps est à la réduction : des assortiments chez les distributeurs et des gammes du côté des industriels, pour des questions de disponibilité d’ingrédient ou de rentabilité. Une nouvelle ère semble se profiler en grande consommation, avec un choix qui tend à se réduire durablement.
Il faut dire que le marché de la grande consommation a atteint un degré de complexité tel qu’il devient, lui aussi, un irritant. Les industriels ont lancé une multitude de références pour gagner de la place en linéaire, laissant les consommateurs parfois perplexes face à ces rayons surchargés de produits et devenus incompréhensibles. Pour autant, on observe une dualité frontale du côté des clients dans ces périodes d’inflation et de sobriété de consommation dictée par l’urgence climatique : ils détestent et adorent, en même temps, l’hyper choix. Il sera, toutefois, compliqué pour chacun des acteurs de trouver l’arbitrage optimal sur le choix des produits.
Du côté des distributeurs, les indépendants auront, sans doute, plus de latitude pour s’adapter. Quant aux industriels, la copie devra être remise à plat. Si pendant des années, tout le monde était convaincu que le succès ne pouvait être au rendez-vous qu’en lançant continuellement des produits, l’heure sera plutôt d’innover moins, mais mieux.
Directeur de la publication : Francis Luzin