Alors que la France recense plus de 1 600 cas de contaminations au Covid-19 confirmés, 900 entreprises ont déjà déposé un dossier de chômage partiel. À la crise sanitaire, s’ajoute une crise économique qui fait progressivement entrer l’Europe en récession. Le 9 mars dernier, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, l’a confirmé devant la presse : “l’épidémie de coronavirus aura un impact sévère sur l’économie française, qui se chiffrera en plusieurs dixièmes de point de PIB durant l’année 2020”, avec, en première ligne, les artisans, les commerçants et les petites entreprises. À ce jour, les professionnels accusent des baisses de chiffre d’affaires de 60 % en moyenne pour les traiteurs, de 30 à 40 % dans l’hôtellerie, de 25 % pour les restaurateurs et ces pertes sont encore plus importantes dans le secteur de l’événementiel.
Face à ce constat, des mesures ont été prises par le gouvernement. Lors des prochaines échéances fiscales, toutes les entreprises confrontées à des difficultés pourront ainsi demander la possibilité de reporter leurs charges de la manière la plus simplifiée possible. Le dispositif prévoit aussi un dégrèvement pour les impôts directs au cas par cas pour toutes les entreprises qui seraient menacées de disparition. Le ministre de l’Économie demande, également, à ce que la solidarité nationale joue à tous les niveaux, notamment celle des donneurs d’ordre privé, des grandes entreprises vis-à-vis de leurs sous-traitants. Il appelle les bailleurs à faire preuve de compréhension dans leurs loyers vis-à-vis de tous les commerçants. Une réponse au cri d’alarme lancé par L’Alliance du Commerce.
L’organisation professionnelle a, en effet, fait état des grandes difficultés rencontrées par les acteurs du commerce depuis janvier. Les grands magasins, boutiques et enseignes de l’habillement et de la chaussure souffrent tout particulièrement d’une baisse de fréquentation. Celle-ci qui touchait jusqu’alors la clientèle touristique internationale, et principalement chinoise, s’étend désormais à la clientèle locale en raison de l’augmentation des cas de Covid-19 en France. Le CNCC constate ainsi une chute de la fréquentation nationale de -3,6 % par rapport à l’an dernier. En outre, les commerçants rencontrent des problèmes d’approvisionnement pour les produits en provenance de Chine et d’Asie. Premier fournisseur des entreprises françaises, la Chine représente plus de 25 % des importations d’habillement. Des retards qui engendrent une baisse des stocks disponibles chez les commerçants, et par conséquent une baisse de leur activité.
Côté consommateurs, l’anxiété monte. L’annonce du passage au stade 2 de l’épidémie, a accentué leurs craintes et leur volonté d’anticiper les achats avant une possible pénurie. Certaines catégories comme les pâtes ou les conserves de poissons ont vu leurs ventes doubler (voire quintupler) à la fin du mois de février, entraînant des ruptures de stock en magasin. “Les consommateurs français sur-réagissent à la situation actuelle en stockant certainement plus que de raison, eux qui ont été confrontés récemment à des blocages lors du mouvement des gilets jaunes, puis à des grèves prolongées qui ont contrarié leur façon de faire les courses”, indique l’institut Nielsen. Sur l’ensemble de la semaine, le chiffre d’affaires de la grande consommation progresse de +5 %, sous l’impulsion des produits d’épicerie (+17 %), des soins pour bébés (+15 %) ou encore des produits de santé (+14 %). À situation de crise, consommation de crise.
Toutefois, si la situation semble plutôt profiter à la grande distribution et au e-commerce, en dépit de perturbations sur la chaîne logistique, il est bon de rappeler l’urgence économique dans laquelle une grande partie des PME et TPE se trouvent. Ces petites entreprises ne disposent pas de la force de frappe des grandes marques de luxe ni des groupes de distribution alimentaire qui sauront, quoi qu’il arrive, absorber les pertes financières et matérielles à venir. Or, ce sont ces acteurs qui, fragilisés par une énième crise, paieront le plus de pots cassés à la fin (espérée) de la pandémie. Des entreprises qui, rappelons-le, représentent 90 % du tissu économique de la France.