“Bienvenue dans le village global?!”, annonçait le sociologue Marshall McLuhan, en 1967, dans son livre Le message, c’est le médium, pour désigner l’impact de la mondialisation, des medias et de l’essor des technologies de l’information et de la communication dans nos vies. Actives. Via Internet, l’ensemble des humains semblent connectés au sein d’une seule et même communauté vivant “dans un même temps, au même rythme et donc dans un même espace”. De n’importe quel endroit de la planète, chaque individu peut accéder à des informations, en un temps record, donnant l’étrange sensation d’exister dans un même e-village.
Ce n’est d’ailleurs plus un secret pour personne. Les distributeurs en savent déjà beaucoup sur leurs clients. Leur adresse postale, leur fréquence d’achat, leur préférence de consommation. Ils sont tracés via leur carte de fidélité ou leur ticket de caisse. C’est ce qu’a permis la révolution numérique: en apprendre davantage sur autrui. Et, en fonction des données collectées par les différents canaux de communication, affiner cette connaissance pour dessiner des profils de consommateurs. Pour, ensuite, les passer au peigne fin. Si les technologies sont prêtes, les stratégies peinent, elles, à se mettre en place dans les entreprises. Encore siloté, chaque service musèle sa propre data, limitant les échanges. Pourtant, les enseignes gagneraient à travailler davantage en commun, de manière plus transversale, afin d’améliorer les services qu’elles proposent aux clients. Malgré tout, des initiatives se mettent en place. À l’image de tests servant à dresser des segments de consommateurs et à dialoguer avec eux, que ce soit dans leur boutique physique ou virtuelle.
Mais parce que les points de contacts se multiplient, leur tâche se complexifie. Surtout dans nos sociétés mobiles où les smartphones en savent plus sur nous que nos proches. Une aubaine marchande pour les entreprises. Sans toujours le vouloir, mais par accord tacite, les clients consentent à partager leurs données personnelles avec les marques. À chaque mot-clé tapé sur les moteurs de recherche, à chaque clic sur les bannières publicitaires, à chaque lecture de fiches produits, à chaque acceptation de politique de cookies, à chaque application téléchargée, une multitude d’informations, pas toujours structurées ni qualifiées, sur les centres d’intérêt sont livrées, gratuitement, aux marques. Pis encore, avec les données transactionnelles. Le client est aussi tracé en magasin avec les technologies iBeacons. Ou le simple fait d’avoir laissé actif son WiFi en passant devant une vitrine. Seulement, que faire avec ces données? Comment les relier entre elles pour offrir une expérience d’achat sur-mesure? En fonction de la taille du commerçant et de sa nature – brick & mortar, VAD, e-commerce – les leviers actionnés diffèrent. Et les résultats des expériences réalisées sont souvent cachés. Arme concurrentielle, le marketing 3.0 pourrait s’avérer redoutable en termes de retour sur investissement: les distributeurs qui auront mis en place des techniques de personnalisation rodées sur leur base client pourraient voir augmenter leur chiffre d’affaires de 30% d’ici 2018 (Source Gartner).
Les marques sont pourtant encore balbutiantes. Auraient-elles peur d’adresser le mauvais message au mauvais client? Peut-être serait-il temps de relativiser. L’erreur n’est pas forcément fatale. Et rien qu’à voir le peu d’émule qu’a suscité la loi sur le renseignement français, la faute marketing semble excusable. Même pardonnable. Comme ce qui vient d’arriver à un consommateur allemand avec sa bouteille de ketchup Heinz, lorsqu’en flashant avec son mobile le QR Code pour dessiner une étiquette personnalisée, il a été redirigé sur le site pornographique Fundorado. Il s’agissait d’une campagne de 2014, obsolète, dont le nom du domaine avait été réutilisé. Le client est tout de même ressorti de l’expérience gagnant: il est reparti avec sa bouteille de sauce tomate et un abonnement au site. Ce buzz, plutôt comique, pourrait même encourager d’autres clients à affectionner la marque. À elle d’en tirer les leçons qui s’imposent. Car la personnalisation reste étroitement liée au traitement de l’information et à leur sécurisation. Seuls moyens de créer une relation one-to-one. Donnant-donnant.
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