Un coup de bluff ? Une opération de séduction ? Un véritable marché ? Ce qui est clair, c’est que le bio ne se résume pas à vendre des produits. Il véhicule des valeurs. Un discours relayé par marques et distributeurs qui ont forgé sur ce ciment idéologique leur marketing militant.
La grande distribution a flairé l’opportunité du marché. Mais sans prise de risques, sans doute à juste titre. La course s’est engagée sur l’offre et le prix à grand renfort de MDD bio dans les rayons. Pour le reste, seul Auchan s’est positionné clairement sur ce segment en empiétant sur les plates-bandes des spécialistes qui réalisent, encore, 30% du marché. L’enseigne vient, en effet, de lancer un nouveau modèle de point de vente, Cœur de Nature, entièrement dédié au bio. Y trouvera-t-elle son compte ?
Pas sûr. À y regarder de plus près, les motivations d’achat des consommateurs pour le bio semblent battre de l’aile. L’argument nutritionnel “bon pour la santé”, premier facteur d’achat (97%), ne tient pas vraiment la route. Pour les scientifiques, il n’est pas prouvé que le bio soit meilleur pour la santé que l’alimentation conventionnelle. Surtout lorsque les productions en petite série laissent libre cours à des pratiques agricoles oubliées où les bactéries s’en donnent, parfois, à cœur joie. En clair, la sécurité alimentaire, du moins sur le court terme, serait mieux assurée par la production agroalimentaire de masse quitte à ingurgiter de nouveaux intrants chimiques dont la combinaison nous rendra peut-être malade dans 25 ans…
Quant aux deux autres motivations d’achat du bio – l’environnement à 90% et l’éthique à 74% -, ils ne sont nullement garantis par la seule appellation du bio. Difficile, dans ces conditions, de fidéliser le client?! L’argument proximité semble mieux répondre à ses valeurs. Car, enfin, faut-il mieux privilégier un produit bio empruntant l’avion sur 1?000?km ou un produit conventionnel issu de l’agriculture locale ? Le bio commence, d’ailleurs, à emprunter le chemin des locavores, un courant qui semble répondre de façon plus pertinente à ces deux valeurs. On parle de bio-local. Des packagings commencent à apparaître dans les rayons. Cela suffira-t-il ?
Car, pour hisser le bio au rang de marché, nombre d’acteurs s’accordent pour dire que les politiques de soutien à ce type d’agriculture ont été catastrophiques de tout temps. Et clairement, aujourd’hui, le gouvernement se détourne des questions environnementales et écologiques pour se concentrer sur les priorités économiques. La crise reprend ses droits sur le bio. To bio or not to bio ? Telle n’est pas la question du moment.