Entrer dans le cerveau des hommes. Fouiller les subconscients. Approcher les désirs. Décrypter les facteurs multisensoriels, affectifs et émotionnels qui influencent les décisions d’achat. Info ou intox? Légal ou illégal? Fantasme ou réalité?
Le moindre que l’on puisse dire, c’est que le neuromarketing est controversé. La technique, tout droit débarquée des États-Unis, est censée mesurer l’impact d’une publicité ou d’un produit sur les consommateurs. Et servirait à disséquer et comprendre leurs comportements grâce à l’identification des mécanismes cérébraux qui interviennent lors de l’achat. Bienvenue dans le monde de l’analyse scientifique et de la recherche médicale mise au service du marketing des marques et de la consommation. Un univers où IRM et électroencéphalographes permettent de visiter la zone cérébrale liée aux émotions afin d’analyser ce qui se passe du côté du système limbique et d’anticiper, ainsi, les moteurs déclenchant de l’achat.
En France, l’utilisation de l’IRM à des fins commerciales est interdite. Mais nombre de marques internationales trouvent leur bonheur de l’autre côté de l’Atlantique, séduites par la promesse de ventes décuplées et d’une fidélisation client accrue par une meilleure compréhension des comportements.
Une centaine de marques utiliserait la technique… tout en refusant de le reconnaître et, bien sûr, de partager leur retour d’expérience. Secret défense. Recette jalousement gardée. Et pour cause: quoi de plus jubilatoire d’être atteint du syndrome de maître du monde en faisant croire aux shoppers qu’ils choisissent eux-mêmes d’acheter tel ou tel produit alors, qu’en réalité, endoctrinés, conditionnés, manipulés, tous leurs sens sont utilisés à des fins commerciales.
Ca, c’est pour le côté fantasme. Le credo qui joue sur les peurs face à une nouvelle technique mâtinée d’une pseudo garantie scientifique. Que dire de la méthode? Un maigre échantillon de population compte tenu des coûts d’utilisation de l’IRM. Des consommateurs en complète immersion dans un tunnel de scanner, déconnectés de leur environnement. Et donc des réponses, très probablement, déconnectées, elles aussi, de la réalité. A priori, le neuromarketing, s’il peut tendre à mesurer l’impact d’un produit sur un consommateur n’est, en aucun cas, une technique permettant aux marques de manipuler les esprits. Tout au plus de les influencer en jouant sur leurs émotions.
Le libre arbitre n’est pas mort. Et il ne suffira pas d’un packaging, d’un parfum, d’une musique, bref, d’un emballage marketing pour enfumer le consommateur et le transformer en pantin. Si le produit n’est pas bon, si l’innovation n’est pas au rendez-vous, si l’usage ne répond pas à un besoin, suscité ou non, la lobotomisation marketing n’y suffira pas. À bon entendeur…