Institutions et économistes s’accordent. La mise en oeuvre simultanée de politiques d’austérité dans la zone euro, en période de bas de cycle, sans banque centrale susceptible de jouer un rôle de prêteur en dernier ressort et avec une sous-estimation des multiplicateurs risque de provoquer un choc négatif puissant sur l’activité économique. Entretien avec Eric Heyer, directeur adjoint au Département analyse et prévision de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques – Centre de recherches en économie de Sciences Po).
Vous estimez, dans votre article “La guerre des 3% aura-t-elle lieu?” que la reprise spontanée de la croissance a été freinée, principalement, par les plans d’économies budgétaires mis en place en France et en Europe pour répondre aux engagements pris vis-à-vis de la Commission européenne, soit un objectif de déficit public à 3% du PIB en 2013…Oui. L’économie française ne devrait croître que de 0,1% en 2012 et de 0,0% en 2013 en moyenne annuelle. C’est une performance particulièrement médiocre et très éloignée du chemin que devrait normalement emprunter une économie en sortie de crise. Le potentiel de rebond de l’économie française était, pourtant, important: il aurait dû conduire à une croissance spontanée moyenne de près de 3% l’an, au cours des années2012 et2013, permettant de rattraper une partie de l’écart de production accumulé depuis le début de la crise. Et c’est bien la mise en place d’une stratégie de consolidation budgétaire, imposée par la Commission européenne, qui a particulièrement freiné cette reprise spontanée. Une stratégie qui devrait amputer de près de 6 points de PIB l’activité en France au cours des années2012 et2013, accentuer le retard de production accumulé depuis 2008 et continuer à dégrader la situation sur le marché du travail. Sans compter que l’objectif de déficit public à 3% de PIB en 2013 sera en partie rogné par le manque à gagner en recettes fiscales compte tenu de la faiblesse de la croissance. Il devrait donc s’établir à 3,5%.
On parle beaucoup de cet engagement des déficits publics contenus à 3% du PIB, un objectif déjà inscrit dans le Pacte de Croissance et de Stabilité, et l’on parle beaucoup moins de l’objectif de 0,5% du PIB pour le déficit structurel, la fameuse règle d’or qui, elle, a fait son apparition avec le TSCG, le nouveau Traité…Ce sont deux engagements différents. La règle d’or est beaucoup moins contraignante que l’engagement pris par l’ancien gouvernement – et repris par