Dans quelques jours, le rendez-vous mondial de la Planète Food ouvrira ses portes. Du 21 au 25?octobre, producteurs, transformateurs, industriels de l’agroalimentaire, start-ups de la Food Tech, distributeurs, professionnels de la restauration, organismes publics, media… tout cet écosystème interdépendant se retrouvera à Paris pour le Sial, la grand- messe de l’innovation alimentaire: 7200 exposants, 250?000?m2 d’exposition, 160?000 visiteurs attendus, 400?000 produits mis en scène pendant 5 jours… Gigantesque.
Cette fois encore, le Sial s’est appuyé sur les études d’experts de l’industrie, de la consommation et de la restauration pour dégager des tendances mondiales. Toutes convergent. Une trilogie serait en passe de transformer l’alimentation de toute la planète autour de trois tendances: le goût, le vrai et le sens. Nous serions dans une véritable phase de transition fondamentale qui s’inscrirait, d’ores et déjà, dans la stratégie de tous les acteurs de l’agroalimentaire. Vraiment?
À l’heure où l’Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation vient de publier son dernier rapport Sofi sur l’état de l’insécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde et estime que 821millions de personnes ont souffert de sous-alimentation chronique en 2017, la trilogie du goût, du vrai, du sens, résonne, quelque part, de façon indécente.
À l’heure où le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) vient de publier, lui aussi, son dernier rapport. Quand tous les voyants sont au rouge et qu’il ne reste qu’une chance qu’il faut saisir vite – dans les dix ans – pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5?°C en réduisant de 45% les émissions de gaz à effet de serre (GES) par rapport à 2010. Lorsque l’on sait que l’élevage occupe un tiers des terres cultivables et génère 15% des émissions de GES, sans compter les ressources en eau. Lorsque l’on sait qu’à l’échelle planétaire, les choix alimentaires pèsent lourd dans la balance climatique et environnementale, mais que les modifications des habitudes de consommation ne suffiront pas à contenir la hausse là où il faudrait sans doute une forte mobilisation politique internationale et un changement radical des modèles de croissance. Alors, le goût, le vrai, le sens… Vraiment?
Pourquoi pas. Parce que ces tendances sont portées par les consommateurs en France comme en Chine, en Russie, au Royaume-Uni, au Moyen-Orient… Les consommateurs reprennent le pouvoir. Ils font pression pour bouger les lignes. Ils exigent plus de transparence, plus de sécurité alimentaire, des produits sains, citoyens, des produits sans ingrédients dangereux, des produits éco-conçus, responsables, du bien-être animal, moins d’emballages, la garantie d’une juste rémunération des producteurs… et sont prêts à payer un peu plus cher. Espérons que les premières réponses des industriels dépassent le marketing opportuniste. Les PME et les start-ups du secteur, elles, ont une belle carte à jouer en étant davantage en capacité à proposer une offre plus fine. Dans tous les cas, tous les acteurs sont prévenus. “Cette transition est nécessaire pour faire face aux défis mondiaux de l’alimentation, d’aujourd’hui et de demain. Elle va demander une remise à plat des modèles agricoles, agroalimentaires et logistique. C’est un défi immense pour tout le monde?!”, avance Nicolas Trentesaux, directeur général du réseau Sial. Dans dix ans, on ne pourra pas dire que l’on ne savait pas…