La proximité en un clic

On n’arrête pas les FoodTech. Alors qu’Amazon déploie son service Fresh aux États-Unis, la France voit naître un nouvel acteur de la livraison à domicile: Epicery, une start-up notamment soutenue par Xavier Niel via son fond d’investissement Kima Ventures, Marc Ménasé (fondateur de Menlook) et Michaël Benabou (cofondateur de vente-privee.com). Fini de trouver porte close, le soir, quand on veut chercher un poulet rôti ou une charlotte aux fraises après le travail parce que le métro a eu trente minutes de retard ou qu’une réunion de dernière minute s’est improvisée au bureau. Lancé en octobre dernier, Epicery vient sauver les gastronomes qui jonglent entre leurs vies personnelle et professionnelle en proposant de livrer en moins de 60 minutes les produits frais des meilleurs commerçants de bouche au même prix qu’en boutique moyennant 3,90?€ de frais de livraison si le commerce se trouve dans un périmètre de 3?km. “Quand on parle d’alimentation, il y a une question qui revient toujours: cuisiner les produits frais, c’est compliqué parce qu’il faut trouver les bons produits et les avoir rapidement à la maison”, explique Édouard Morhange, cofondateur du site, avec Elsa Hermal. C’est à cette problématique de temps qu’Epicery promet de répondre. Arme anti-Amazon Difficile, en effet, de faire les courses quand on a un mode de vie urbain. Les plages horaires des commerçants sont peu adaptées à l’emploi du temps des actifs et le nombre de visites, en semaine, est à la baisse, les consommateurs s’étant de plus en plus habitués à se faire livrer chez eux. Face à la concurrence des gros acteurs – chaînes de distribution et pure players – qui mettent beaucoup de moyens pour être présents sur le digital et aux exigences accrues des consommateurs, Édouard Morhange et Elsa Hermal veulent aider les petits commerçants, déjà affectés par l’ouverture des supérettes de quartier, à exister sur Internet. “On s’est rendu compte qu’il y avait un secteur tout entier de la distribution qui était absent du web, celui des commerces de bouche, pourtant nombreux dans les villes et dotés de savoir-faire exceptionnels”, ajoute Elsa Hermal. L’application Epicery permet ainsi de commander en trois clics des pièces de viande, des fromages affinés, fruits de saison et produits d’épicerie fine. Un pied de nez à Amazon qui, selon Elsa Hermal, “met en péril le tissu économique et social des grandes villes”. Son ambition: faire d’Epicery “l’arme de défense du commerce local” contre le géant américain du web. Critères de sélectionPartis du constat que les Français étaient prêts à payer un peu plus cher pour des produits de qualité (59% des consommateurs, selon l’Ania) et dont ils connaîtraient l’origine, les fondateurs du site ont mis en place une charte stricte sur les produits et des critères de sélections des commerçants partenaires. “Nous travaillons sur recommandation des influenceurs et des gens proches du métier. Nous opérons des dégustations de validation et nous évaluons les commerçants par un système de notation”, indique Édouard Morhange. 150 professionnels sont aujourd’hui inscrits sur le site qui ne dessert, pour l’instant, que la ville de Paris. Mais les deux fondateurs voient plus loin. “D’ici Noël, nous souhaitons être pleinement développés à Paris, voire desservir la petite couronne et atteindre les 250 commerçants partenaires. En 2017, nous visons toutes les villes de France et d’Europe où le mode de vie urbain et la culture du commerce de bouche sont fortes”, annonce Elsa Hermal. Pour les commerçants, cette nouvelle vitrine est payante dès lors qu’il y a des ventes. “Nous prélevons une commission de 25% sur les ventes qui finance une partie des frais de livraison”, précise Édouard Morhange. La plateforme, elle, est fournie gratuitement avec tablette, imprimante et une application de gestion des stocks et des commandes. “Grâce à Epicery, les commerçants disposent d’une boutique ouverte 24h/24, où les produits sont mis en avant avec des fiches détaillées. Ils peuvent réaliser des ventes additionnelles et récupérer le volume qui aurait été perdus auprès de leurs clients actuels”, ajoute Elsa Hermal, convaincue que cette activité sur le web va amener du trafic supplémentaire en boutique et permettre aux commerçants d’étendre leur clientèle hors de leur zone de chalandise. Reste à savoir maintenant si les consommateurs sont vraiment prêts à payer des frais de livraison pour recevoir des produits qu’ils peuvent acheter en bas de chez eux, la relation humaine et l’expérience magasin en moins.