Nos habitudes de consommation ont évolué depuis l’après-guerre. Quels sont les nouveaux paradigmes alimentaires? Jean-Louis Lambert. À l’échelle de l’histoire de l’espèce humaine, l’environnement des mangeurs est totalement inédit. Jusque-là, nos choix étaient restreints par des disponibilités faibles et locales. En quelques dizaines d’années, la donne a changé: sur le plan quantitatif, les disponibilités se sont accrues et sur le plan qualitatif, de nombreuses innovations, y compris dans le système de distribution, sont apparues. Pour que les mangeurs s’adaptent à cet environnement, il faut compter plusieurs générations. L’augmentation du surpoids et de l’obésité est, notamment, le résultat d’un renversement de tendances. Nous sommes passés d’une malnutrition par insuffisance, qui concerne encore 1,4?milliard d’habitants, à une malnutrition par excès. D’autant plus que l’offre alimentaire augmente, les besoins en apports énergétiques et nutritionnels diminuent, les individus se sédentarisant davantage.
L’explosion de l’offre alimentaire a toutefois ouvert une route au marketing, toujours en quête de nouveauté? Rompant avec la monotonie alimentaire qui sévissait il y a un siècle, notre société jouit désormais d’une situation de variété, de quantité et de qualité de l’offre incomparable. Paradoxalement, si les consommateurs réclament d’avoir le choix, quand ils l’ont trop, ils sont embarrassés. Cette profusion de l’offre les oblige à réfléchir, ce qu’ils n’ont pas envie de faire lorsqu’ils font leurs courses, pratique routinière et trop fréquente pour s’adonner aux questions à chaque rayon. En outre, ce qui pousse les marques à se manifester sans cesse, c’est la montée de la concurrence entre offreurs. À partir du moment où les consommateurs ont atteint un seuil de saturation quantitative, la compétition entre les acteurs s’est exacerbée et donne naissance à des stratégies de différenciation et d’innovation. Nous sommes entrés dans l’ère de l’hyper-choix. Cela fait 25 ans que le volume des dépenses alimentaires n’augmente pas plus que la démographie.
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