Il y a, comme ça, des idées qui surgissent, qui deviennent éclairantes. On en tire des concepts, on bâtit tout un monde. Des territoires inexplorés. On se prête à rêver, à se trouver une âme de pionnier. Ça se passe souvent comme ça quand émergent les tendances. Et le retail est plutôt un champ d’expérimentation foisonnant.
Cela dit, passée la première excitation, vient le temps du recul, de la réflexion, de la distance nécessaire. Et là, franchement, on a parfois, l’impression de s’entendre marteler des évidences. En ce moment, le “truc” tendance sur toutes les lèvres de consultants, de marques, de distributeurs, bref, partout, c’est de “mettre le consommateur au cœur de notre attention, au cœur de notre stratégie”. Pourquoi? Ça ne l’était pas? Où était donc placé le client? À la périphérie de l’entreprise? “Le client a toujours raison”, nous disait déjà Mr Selfridge. L’aurions-nous un temps oublié?
Sans doute. Un peu. Une histoire de marges, de chiffres, de culture… De priorités différentes. Mais à y regarder d’un peu plus près, c’est à se demander si cette attention retrouvée pour le consommateur n’est pas davantage contrainte et forcée plutôt que le fruit d’un soudain altruisme révélé. Parce qu’en fait, il semble bien que distributeurs et industriels n’aient plus vraiment le choix. Le consommateur a sorti les armes. C’est lui le boss?! Il a pris le pouvoir.
Acteur principal de ce nouveau monde, le client est connecté, superinformé, multicanal, il fait la pluie et le beau temps à la barre des réseaux sociaux, donne son avis sur tout et veut tout, tout de suite… Plus moyen de lui pousser des produits de façon linéaire et séquentielle comme auparavant. Les flux sont tirés par la demande. Le consommateur n’est plus positionné en aval de la chaîne de valeur, mais au centre. Ce qui oblige les entreprises à inventer des business models plus collaboratifs et décentralisés, dans une logique de service. Autrement dit, pour rester dans la course, distributeurs et industriels doivent s’organiser en réseaux autour du consommateur pour lui offrir une multiplicité de canaux et toute l’agilité qu’il souhaite. Un défi essentiel à relever. Harry Gordon Selfridge avait raison. Ne l’oublions pas.
31 mars 2016