Pourquoi avoir consacré un livre aux pratiques des consommateurs?L’idée de départ de cet ouvrage collectif était d’observer, à travers une série d’enquêtes de terrain et de réflexions sociologiques, ethnologiques et économiques, quels effets la crise de 2008 a pu avoir sur le pouvoir d’achat des Français et comment ces derniers se sont organisés pour vivre dans un contexte de crise. Étonnamment, notre premier constat a été de voir que l’impact de la crise sur la consommation ne s’est pas fait ressentir immédiatement, de façon évidente. Je me souviens avoir interviewé, en 2009, un directeur des Centres E. Leclerc dans l’Est de la France qui m’affirmait ne pas avoir remarqué de baisse des paniers d’achat dans son magasin. Il a fallu, de fait, attendre 2011-2012 pour observer le développement de comportements plus économes, typiques des pratiques de consommateurs sous contrainte de pouvoir d’achat et qui perdurent. Signe qu’ils sont effectivement liés à la crise. N’en déplaisent aux économistes qui annoncent, déjà, que la récession est derrière nous, d’un point de vue sociétal, le chômage, lui, continue d’augmenter. Et tant qu’il y aura du chômage, nous resterons en crise.
C’est quoi, pour vous, être un consommateur malin?Notre hypothèse est de considérer que le consommateur a toujours été malin. Et notre sous conclusion est de dire que si celui-ci a, pendant longtemps, été pris pour un idiot ou un être passif face au marketing, en réalité, il n’en est rien. Nous avons, dans ce sens, distingué trois grandes typologies de consommateurs. Les calculateurs, d’abord, qui planifient et contrôlent leurs dépenses via des listes d’achat, des comparateurs de prix. Ceux-là vont sur les réseaux numériques pour s’informer auprès d’experts. Pas forcément sous contrainte de pouvoir d’achat, ils veulent surtout maîtriser, de façon rationnelle, leur budget. Le second type est celui des explorateurs qui vont acheter plus occasionnellement des produits pour se faire plaisir. Ils communiquent par