Les ventes de glaces ont explosé en 2020. En cause, le contexte sanitaire et les deux confinements qui ont boosté la consommation à domicile et ont poussé les consommateurs à vouloir se faire plaisir dans ce contexte morose. Le segment est également dynamisé par de nombreuses innovations qui continuent d’animer et de renouveler l’ensemble des catégories, y compris le bio, en croissance.
Par Sandrine Panossian-Kahn
Les points forts
► Marché
+10,3 % en valeur entre 2019 et 2020
► Tendance
Pots et mini-pots en grande forme
► Bio
En croissance de 13,5 % en valeur
“Le marché des glaces est habituellement très saisonnier”, analyse Fréderic Coti, directeur des projets de transformations chez Ferrero en France, dont la majorité des ventes se situe entre avril et septembre, l’été. “Ainsi, la saison impacte l’acte et la fréquence d’achat : 84 % des foyers français achètent 8 fois par an de la glace dans la grande distribution”, ajoute-t-il. “Les 12 derniers mois ont été inédits car nous n’avons jamais connu un tel contexte sanitaire, explique Julian Desombre, directeur Commercial chez Glaces de Lyon. L’effet a été énorme avec un marché qui a augmenté d’une manière très importante en 2020 alors qu’en 2019, nous étions sur un marché plutôt en berne”.
Le marché des glaces a ainsi augmenté de +10,3 % entre 2019 et 2020, notamment parce que les Français avaient envie de se faire plaisir après avoir passé le début de l’année en confinement (Source : Syndicat des glaces, mars 2021). En Europe, il représente 61 Mds€, soit 14 % de l’épicerie sucrée (Source : Nielsen au CAM P13 2020-HMSM proxi drive HD), en croissance CAGR (Compound Annual Growth Rate ou TCAC – Taux de Croissance Annuel Composé) de +4,2 % en 10 ans. En France, il représente 1,2 Md€, soit 8,5 % de l’épicerie sucrée. Des données confirmées par Nielsen qui indique une forte croissance de +9,7 % en valeur du marché en 2020 (Hyper super proxy drive hard discount à fin 2020). “Nous avons vécu une belle année drivée par deux éléments majeurs : une météo positive par rapport aux moyennes saisonnières habituelles et une consommation accrue à domicile liée notamment à la fermeture des restaurants et au télétravail”, indique Jérôme Nouveau, directeur de la division Unilever Glaces. “2020 a été une année atypique, précise Bérengère Dupui, Marketing Director France Häagen-Dazs, y compris pour les glaces.
Nous avons assisté à un report des occasions du hors domicile vers le domicile dû à la crise sanitaire et à la fermeture des points de vente. Nous avons également observé un très fort dynamisme des catégories plaisirs, dont les glaces, et un besoin de réconfort dans un contexte morose. Ainsi, beaucoup de produits plaisirs ont été vendus sur l’année 2020 et également lors du deuxième confinement qui a pourtant eu lieu en hiver. Enfin, la catégorie reste assez dynamique en ce début d’année 2021”. Sur 2020, deux tendances se confirment : tout d’abord le plaisir et la gourmandise. “Dans ce contexte plutôt morose, ce sont les drivers les plus conséquents qui ont permis aux innovations de bien performer. L’autre tendance concerne le commerce plus responsable : il y a beaucoup d’initiatives et d’engagements des marques sur l’impact environnemental des packagings ou encore la réduction du niveau de sucre dans les recettes…”, ajoute Jérôme Nouveau.
Pots et mini-pots performent
En GMS, le segment des bâtonnets est le plus important (PDM CA 31 % des glaces – 371 M€) et connaît une croissance continue (+4,8 %/an de 2014 à 2020 / Source : Nielsen au CAM P13 2020-HMSM proxi drive HD). Il est suivi par les
grands pots et les bacs (25 % de PDM valeur), les cônes, (19 %), les barres (6,5 %), les spécialités enfants (6,5 %), les cups ou mini pots (5 %) et autres (7 %). “Les consommateurs cherchent davantage une consommation individuelle, ultra-gourmande et nomade, analyse Fréderic Coti. C’est pourquoi les bâtonnets ont un francs succès depuis quelques temps. Les Français cherchent avant tout à se faire plaisir avec des glaces riches en saveurs et en textures. Ils aiment aussi varier les plaisirs”. Pour répondre à cette tendance, les industriels innovent régulièrement. D’ailleurs, le marché des glaces est celui qui, en alimentaire, offre le plus d’innovations (10 % du CA total glace vs 2,5 % en moyenne sur les PGC – source : CAM P13 2020 HMSM drive proxi). Quant au marché des sticks, c’est le plus dynamique de la catégorie avec une augmentation de +5 % par an depuis 25 ans. “L’offre plaisir est très dynamique, analyse Bérengère Dupui. Nous proposons du plaisir gourmand au consommateur avec l’idée de sublimer les mélanges en faisant rencontrer deux glaces dans un même pot”. Häagen-Dazs lance ainsi la gamme Duo et la décline en 3 parfums : Belgian chocolate & Vanilla crunch, Dark chocolate & Salted caramel crunch et Belgian chocolate
& Strawberry crunch. En parallèle, la marque propose un nouveau parfum dans sa gamme Fruit Obsessions : Cantaloupe Melon et un nouveau bâtonnet Mango & Cream. “Les pots et les mini-pots affichent une très forte augmentation de +24 % en valeur (données Nielsen à fin 2020 – Hyper super proxy drive hard discount). Ce sont des références très axées sur la gourmandise et la consommation à domicile qui sont porteuses dans le contexte actuel, précise Jérôme Nouveau, directeur de la division Unilever Glaces. Les bâtonnets gourmands premium du type Magnum sont en croissance de +13 %, tirés par les performances de Magnum et de nouveaux venus sur le segment. Sur 2021, nous allons continuer à construire sur ces tendances de fond”. Ainsi, la marque Magnum lance une nouvelle référence gourmande, Magnum Double Gold Caramel Billionnaire en grands bâtonnets, en mini bâtonnet et en pots. Autre lancement majeur avec Ben & Jerry’s, une nouvelle gamme de produits dédiés à Cookie Dough en pots, avec la gamme Cookie Dough Twist, et en mini-pots pour répondre aux stratégies sur la gourmandise et sur le développement responsable et durable au travers des engagements de la marque. Toujours dans une logique de diversification, Unilever se lance sur deux nouveaux segments encore peu exploités par le groupe : celui des cônes avec une glace Cornetto à l’italienne, et la catégorie “enfants”, dans le cadre d’un nouveau partenariat avec Disney pour lequel Unilever a pris des engagements très stricts d’un point de vue nutritionnel, avec 110 kcal maximum par portion. “Nous serons présent cette année avec 4 licences : Star Wars, Reine des Neiges, Avengers et Spider-Man, gamme que nous ferons évoluer selon l’actualité Disney”, affirme Jérôme Nouveau.
Toujours sur le segment des pots de glaces premium et des mini-pots, la marque Glaces de Lyon bénéficie d’un savoir-faire artisan et de produits fabriqués en France avec des listes d’ingrédients sains sans conservateurs et sans aromes artificiels. “Nous sommes capables, sous notre gamme La Manufacture des Belles Glaces, d’avoir des sorbets plein fruit à la Mirabelle de Lorraine, à la Poire Williams de la région Rhône-Alpes ou à la Pêche de vigne des coteaux du Lyonnais pour le côté terroir, précise Julian Desombre, directeur Commercial chez Glaces de Lyon. Tout comme des produits emblématiques comme la Crème glacée au nougat de Montélimar de chez Chabert & Guillot ou les nouvelles Crème glacée au cannelé de Bordeaux et Crème glacée à la noisette d’Italie…”. La Manufacture des Belles Glaces propose des Coffrets Duo avec 4 pots de deux saveurs différentes : un coffret gourmand avec le duo de crèmes
glacées Vanille Bourbon Macadamia et sauce caramel / Caramel, Sel de Guérande et sauce caramel ; et un coffret plaisir avec un duo de sorbets plein fruit Fraise Senga Sengana avec morceaux et Citron Vert des Amériques avec zestes. La marque a lancé, l’an dernier, une nouvelle offre de cinq sorbets, valorisant les saveurs des Antilles, sous la gamme Caresse Antillaise, qu’elle enrichit d’un nouveau parfum à l’Ananas avec 60 % de fruit.
De son côté, Ferrero étend son terrain de jeu au marché des glaces en misant sur ses marques Ferrero Rocher et Raffaello. “Grâce à notre savoir-faire, les glaces Ferrero Rocher et Raffaello offrent une nouvelle dimension de la glace avec leur forme ronde et leur texture rafraîchissante. Leur format, entre le mini et le grand bâtonnet, permet de déguster de petits plaisirs gourmands avec la juste dose”, indique Fréderic Coti, directeur des projets de transformations chez Ferrero en France. Ces innovations glacées se déclinent en 3 saveurs : Classic, Dark (chocolat noir) et Raffaello (noix de coco).
Bio et naturalité
Une offre de plus en plus présente
French by Nature est une jeune entreprise lyonnaise créée en 2018. “Nous proposons une offre de glace 100 % bio sous la marque What the French (WTF) dédiée aux millennials, indique l’un de ses cofondateurs, Philippe Varloud. Les 18/35 ans représentent 58 % des consommateurs de glace. C’est une génération qui est à la recherche d’innovations, de recettes disruptives et de produits bio”. Pour autant, l’offre bio en glace est très faible : elle plafonne à environ 1 % du marché alors que le bio représente environ 6 % de l’ensemble des produits alimentaires. “Nous constatons un retard sur le segment des glaces alors que les produits bio génèrent de la croissance”, continue Philippe Varloud. Ainsi, selon les données de Nielsen en cumul de janvier 2020 à janvier 2021 inclus, les produits bio affichent une augmentation de leurs ventes de +13,5 % en valeur alors que les produits de grande consommation augmentent de +6,9 % en valeur, et au sein d’eux, les surgelés sont en croissance de +12,5 % (+13,6 % pour les surgelés salés et +9,4 % pour les surgelés sucrés). L’année 2020 a vu les consommateurs cuisiner chez eux avec la fermeture des restaurants, aller moins souvent dans les hypermarchés et stocker plus. Les surgelés sucrés (glaces, desserts, gâteaux, entremets) sont ainsi l’une des familles qui a progressé le plus.
Côté réseaux de distribution, les hypermarchés ont progressé de +1 % quand les supermarchés ont augmenté de +7,1 %, les proxi de +8,8 % et le e-commerce de +45,6 %. “Ainsi, plus on est prêt de chez soi, plus on achète et plus il y a de la croissance, aux dépens des hypers qui ont davantage de contraintes et de mesures barrières”, précise-t-il. Reste que le poids des marques PME est encore faible sur le segment (moins de 5 % du marché), mais ce sont elles qui génèrent de la croissance.
Sur le marché des glaces (1,3 Md€), les mini-pots (10 % de PDM valeur en hausse de +30 %), les bâtonnets (24 % de PDM, +13 %) et les cônes (17 % de PDM, +11 %) ont généré le plus de croissance en 2020 et tirent le marché, grâce notamment à l’innovation, “l’un des moteurs de croissance du segment (14 % versus 3 % dans l’alimentaire) avec l’arrivée des PME et le taux de croissance de l’offre bio, ajoute-t-il. Les chiffres démontrent que les clés d’entrée sont le plaisir et la gourmandise. Cela fait sens de se positionner comme une PME française avec une offre 100 % bio : c’est une façon d’ajouter une notion de santé et de naturalité”. Ainsi, French by Nature propose une gamme de recettes de glaces bio en pots 100 % française et lance cette année une gamme de bâtonnets WTF (What the French) fabriqués en France et 100 % bio.
De son côté, Glaces de Lyon a déployé sa première offre bio en mars 2020, avec sa signature La Manufacture des belles glaces. Il s’agit de pots de 460 ml labellisés AB, disponibles en cinq saveurs : trois sorbets plein fruit (la framboise avec 52 % de fruit présent dans la recette ; le citron et l’abricot avec 60 % de fruit) et deux crèmes glacées (la vanille Bourbon de Madagascar et le chocolat). Ces parfums sont tous garantis sans conservateurs, sans colorants ni arôme artificiel.
Claire Loiseau,
experte Compte
Clé IRI
en partenariat avec
Une belle reprise
“En 2020 comme sur ce début d’année, les Français confirment leur nouvelle appétence pour les glaces. Sur un cumul annuel mobile à fin mars 2021, le rayon surgelés sucrés représente un chiffre d’affaires de près de 1,5 milliard d’Euros. Le rayon progresse fortement à la fois en CA (+10,9 %) comme en volume (+9,6 %) et enregistre même une dynamique supérieure aux surgelés salés (+7,6 % en CA) et à la moyenne des produits de grande consommation (+5 %). Une bonne santé qui va au-delà de l’impact de la Covid avec une croissance à 2 ans également supérieure aux PGC. À noter toutefois des évolutions hétérogènes selon les catégories. On pointera tout d’abord le succès des spécialités glacées individuelles (croissance +12 % en CA) ainsi que des sorbets et crèmes en pot et bac (+10,4 %) qui traduisent tous deux un besoin de réconfort des Français dans des petits plaisirs gourmands. À l’inverse, les spécialités de fin d’année et les spécialités à partager sont pénalisées par la crise sanitaire et les contraintes de mobilité et de regroupements subies par les Français sur l’année écoulée.
Une météo déterminante
Signes encourageants pour le rayon : le début d’année est prometteur avec une dynamique qui se confirme sur le 1er trimestre 2021 avec un très beau mois de mars notamment (données fin 4 avril) grâce un effet coup de boost de la semaine de Pâques couplé d’une météo particulièrement favorable cette année. Autre point positif, contrairement à la plupart des rayons PGC, les glaces ne subissent pas de coupures dans les assortiments en hypers comme en supers sur ce début d’année.
Cependant, la météo du printemps 2021 restera déterminante dans le démarrage de la saison et le challenge reste de mise sur les mois à venir. Il sera en effet compliqué pour la catégorie de conserver une dynamique marquée compte tenu de l’historique fort sur les mois d’avril et de mai 2020. En effet, lors du confinement N°1 qui avait été couplé d’une météo exceptionnelle, les glaces avaient enregistré des taux de croissance exceptionnels de + 37% en CA en avril 2020 vs 2019 et + 55% en mai 2020 vs 2019. De beaux défis en perspective pour les acteurs de la catégorie”.