Si le nombre de naissance est en recul, les attentes des parents se confirment avec la crise sanitaire. Au menu : des ingrédients bien sourcés et des emballages de plus en plus responsables.
Par Sidonie Wathier
Les points forts
► Fait maison
Il occupe le terrain
► Bio
Plus qu’une exigence
► Drive et e-shop
Les grands gagnants
Le recul n’est pas inquiétant, certes. Mais il révèle combien l’année 2020 a marqué le marché de l’alimentation infantile. La Covid est passée par là, entraînant de nouvelles pratiques culinaires pour toute la famille, y compris les tout-petits. Les
parents, entre télétravail et confinement, ont privilégié le fait maison. Ils ont légèrement réduit leurs achats de petits pots et de plats cuisinés. Par ailleurs, le nombre de naissance – 740 000 – continue de baisser depuis 2015. Ces éléments, cumulés, impactent logiquement les ventes même si, pour la plupart des parents, il est devenu rapidement difficile d’assumer vie professionnelle à la maison et quotidien familial. Le marché des aliments infantiles a ainsi enregistré un très léger recul de 0,1 % en valeur et -1,2 % en volume. Seule la catégorie du petit déjeuner croît de +8,1 % en valeur et +14,3 % en volume. Le segment des laits infantiles connaît une baisse de 0,2 % en valeur et -3,2 % en volume avec une légère hausse des ventes de lait 2e âge (source IRI, février 2021). Les seuls acteurs du marché à avoir tiré leur épingle du jeu ont été ceux qui disposaient d’une bonne visibilité en linéaire. Les consommateurs ayant concentré leurs achats sur les produits les mieux distribués, et issus, pour la majorité, du conventionnel.
Les petits plats dans les grands
En écho à la crise sanitaire, les intervenants repositionnent leurs offres ou lancent des innovations de rupture pour séduire les parents en quête de fait maison mais qui n’ont pas forcément le temps de passer du temps en cuisine. Potpotam, qui a subi de plein fouet le premier confinement avec une baisse de plus de 50 % de ses ventes, a choisi de se réinventer. Positionné depuis ses débuts, il y a trois ans, sur des petits pots vendus au rayon frais, la société a revu son processus de cuisson pour passer au rayon ambiant. “Nous restons toutefois sur une cuisine très travaillée. Nos recettes sont toujours dans des verrines transparentes avec la volonté de bien mettre en avant le produit”, précise Sébastien Gadras, cofondateur de Potpotam. Un changement radical qui permettra à la marque de bénéficier de plus de place au sein du linéaire et de présenter, ainsi, ses 20 références. Blédina, acteur incontournable du marché, propose depuis l’an dernier de la gamme Les Récoltes Bio à Mélanger. “Il s’agit de la première offre pour cuisiner maison au quotidien qui s’inscrit au cœur des nouvelles attentes des parents. 73 % d’entre eux disent cuisiner régulièrement pour leur bébé et leur famille”, indique un porte-parole de la marque. Ce concept permet de disposer de 17
ingrédients bio à mélanger pour composer, en moins de 15 minutes, des recettes comme des purées de légumes brutes, des féculents moulus, des Mini Pâtes à mélanger aux plats, des sauces de légumes avec des herbes aromatiques ou des épices. Si le rayon frais et ambiant évolue constamment, celui du surgelé peine à bouger. Pourtant, un intervenant comme Yooji tente de changer les choses avec une offre de purées et hachés de viandes, poissons et légumes. “Nous avons connu une très belle année 2020 avec une progression de +50 % et cette tendance se confirme depuis le début 2021”, se réjouit Jérémy Strohner, PDG. “Nous répondons aux attentes du
marché et du fait maison”.
De bio bébés
En complément, les intervenants spécialistes de la bio capitalisent sur leur stratégie pour fidéliser et toucher une nouvelle clientèle. Vitagermine s’appuie sur la production de légumes dans ses deux fermes pour élaborer les recettes de Babybio. Cette année, deux nouveautés risquent bien de ravir ses adeptes : la courge violina et les brassés en format petit pot disponibles au lait de vache, brebis/chèvre et lait végétal. “Nous avons un savoir-faire en amont, sur les filières, glisse Stéphane Priou, responsable marketing Vitagermine. Sans oublier l’assortiment, large, un choix d’ingrédients sélectionnés”. Et, pour compléter
son offre de gourde de fruits, Vitagermine lance un format en 120 g aromatisé à partir d’une fleur, un concept très innovant. Sur les laits, dont les références bio deviennent un standard, Babybio bénéficie d’une large gamme sur laquelle il est indispensable de communiquer. Ce sera le cas cette année avec le sponsoring de l’émission Les Maternelles. De son côté, Blédina, reconnu pour ses gammes conventionnelles, affiche sa volonté de trouver une place parmi les marques bio. “Nous sommes présents sur le segment des laits bio avec des gammes complémentaires comme celle de Laboratoire Gallia Bio, disponible en 3 références poudre pour le 1er, 2e & 3e âge.
Cette offre est complémentaire à notre référence Calisma Standard. Elle répond aux attentes des parents souhaitant un lait infantile biologique, tout en alliant science et expertise dans la formulation de la recette infantile”, explique un porte-parole Blédina. Toutes ces évolutions ne seraient rien sans une adaptation aux modes d’achat des Français. Difficile, aujourd’hui, de faire l’impasse sur le drive et le digital. La crise sanitaire accélère cette tendance. “Au niveau des comportements, le drive et la vente en ligne vont s’inscrire dans les habitudes d’achat”, souligne Stéphane Priou, directeur marketing Vitagermine. Les intervenants doivent désormais prendre en compte ces nouvelles attentes sous peine de perdre bon nombre de consommateurs. La notion de service, sur ce canal de distribution, fait la différence.
Tendance
Une dualité comportementale
Selon une étude réalisée par l’Institut des mamans concernant les habitudes d’achat d’alimentation infantile pendant le confinement, 18 % des interrogées déclarent rechercher des promotions et 11 % des marques plus accessibles. Une démarche directement liée à la baisse de pouvoir d’achat de certaines familles dont les parents ont pu se retrouver au chômage partiel, voire au chômage tout court. Parallèlement, 33 % des mamans continuent à privilégier le bio et 23 % d’entre elles favorisent les ingrédients français. Enfin, 36 % avouent servir le même repas à toute la famille pour générer des économies financières et de temps.
Développement durable
S’engager, enfin une réalité
Depuis l’an dernier, Babybio, du groupe Vitagermine, fabrique des recettes réalisées à partir de produits cultivés dans ses propres fermes. Un signal fort lancé auprès des parents, certes, mais également auprès de la filière agricole. Aujourd’hui, l’intervenant dispose d’une gamme de 7 références, confirmant ainsi son engagement. Une initiative qui donne des envies à d’autres acteurs du marché de l’alimentation infantile. Blédina accompagne ses 200 agriculteurs partenaires en les aidant à ”développer des pratiques agricoles plus durables par la conversion au bio, la réduction de leur empreinte carbone, la protection des sols, des ressources en eau, et de la biodiversité, par exemple. Nous avons pris l’engagement, pour notre gamme Les Récoltes Bio, d’avoir un approvisionnement à 80 % français et nous avons atteint cet objectif”, glisse-t-on chez Blédina. Pour soutenir les producteurs de poire Williams, le groupe a décidé d’augmenter de 20 % la rémunération de ses agriculteurs partenaires de poires et de participer à la plantation de poiriers. L’engagement prend forme.
Démographie
Une natalité en berne
2020 n’est pas une exception. Et le nombre de naissances à la baisse n’est pas lié à la Covid. La tendance se confirme depuis 2015 et aujourd’hui, le taux de fécondité en France s’établit à 1,84. L’âge moyen augmente pour atteindre 30,8 ans en 2020 contre 29,3 ans il y a vingt ans. On note également un engouement pour l’allaitement des bébés jusqu’à l’âge de 6 mois. Toutefois, il risque bien de diminuer avec les nouvelles générations de jeunes femmes, plus engagées et moins soumises aux diktats de la société.
Sophie Rousset,
responsable Grands Comptes
en partenariat avec
Authenticité et plaisir
“L’alimentation infantile n’a pas réussi à tirer son épingle du jeu face à la crise sanitaire que nous avons traversée en 2020 et finit l’année à peine stable en évolution CA au tous circuits à +0,1 % face à un total PGC FLS à +6,9 % et une épicerie salée à +9,5 %. Comme ce que nous avons pu observer au total PGC FLS, la situation est bien différente selon les circuits de distribution. Le marché progresse à hauteur de +18,2 % au total e-commerce GSA, mais ce rythme est bien en-deçà du total PGC FLS (à +43,1 %) pour cette catégorie historiquement forte sur ce circuit qui voit sa part d’offre
challengée au total PGC FLS face à la progression de nouvelles offres liées aux nouveaux consommateurs captés par ce circuit clé face à la crise sanitaire.
Recul en hyper et super
C’est en HM que l’alimentation infantile affiche un recul très marqué à -5,2 % en ventes CA en 2020 (vs. PGC FLS à +0,8 %). La performance de la catégorie a été très nettement impactée par le recul de son assortiment, notamment sur le dernier trimestre 2020, où elle voit son offre reculer de -5,9 % au total HM, se plaçant ainsi au rang de 2e catégorie des PGC FLS les plus touchées par la rationalisation de l’assortiment des PGC FLS sur le 4T 2020 en HM. Ces difficultés touchent aussi bien les laits infantiles (à -4,4 %) que les aliments bébé (à -5,9 %). Ce sont surtout pendant les périodes de confinement qu’on a pu observer le décrochage de performance pour les aliments bébés. De fait, ce segment s’est trouvé confronté notamment au retour en force du “fait-maison” du fait de la crise COVID. L’offre biologique sur l’alimentation infantile continue à afficher une croissance en ventes CA à +7,0 % en HM, mais son rythme est bien inférieur à celui de l’an passé (+23 % en 2019).”