“Alors, il est bon ton morceau de cadavre?” Quel amateur de viande n’a pas, un jour, eu droit au regard furibard et à la remarque assassine d’un défenseur de la cause animale? Jusqu’alors relativement en marge de notre société gastronome, les végétariens ne représentent qu’une infirme partie des consommateurs (1% selon le Crédoc) mais ils se font davantage entendre. “Pendant longtemps, il n’était pas facile pour les Français de se déclarer végétarien à cause du poids de notre culture à l’égard de l’alimentation, qui laisse une place centrale à la viande. Avec l’individualisation du rapport à l’alimentation et à l’animal, cette parole s’est libérée”, analyse le socio-anthropologue Jean-Pierre Poulain. Plus sensible aux questions du bien-être animal, plus engagée dans la défense de l’environnement, la société française a modifié son rapport à la viande. “Les représentations de la viande ont évolué. Nous ne sommes plus dans une société où la force physique, l’agressivité et la violence sont célébrées. Le travail devenu moins pénible, la virilité n’est plus une qualité survalorisée, et par là même, la viande comme dispensatrice de force”, commente Éric Birlouez, ingénieur agronome et sociologue. L’entrecôte saignante débordant de l’assiette ne fait plus fantasmer. Pis, elle dégoutte et effraie.
Tabou de la mise à mortCar derrière la viande, il y a l’ombre de la mort. Si chasser fait partie des activités humaines qui remontent à la préhistoire, le fait de consommer de la chair animale afflige une partie de la population contemporaine. L’urbanisation de notre société contribue à ce rejet. “La population