S’il est un grand gagnant de la crise sanitaire qui sévit depuis 18 mois, c’est bien l’e-commerce alimentaire qui s’est vu propulsé en haut du classement des nouvelles habitudes des consommateurs. À l’échelle mondiale, le poids d’internet a progressé de façon significative dans les achats des ménages, comme le révèlent les chiffres NielsenIQ, en partenariat avec la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (FEVAD). En Europe, le marché du e-commerce s’est consolidé dans tous les pays. Au Royaume-Uni, précurseur en la matière, le circuit online a gagné plus de 4 points entre 2019 et 2020, passant de 7,6 % à 12 % de part de marché. La France a suivi le mouvement, affichant une progression des ventes en ligne très supérieure à celle des ventes offline depuis le premier épisode de panique en magasins provoqué par le premier confinement, en mars 2020.
Sur l’ensemble de l’année 2020, les ventes des produits de grande consommation sur Internet ont ainsi augmenté de 42 %. La tendance ne se dément pas en 2021 : le e-commerce progresse encore de 13 %, renforçant sa part de marché à 9 % depuis le début de l’année. La France se distingue de ses voisins européens par la grande diversité des formats de distribution proposés sur son territoire : entre les drives opérés par les enseignes d’hypermarchés et supermarchés, qui concentrent l’essentiel des ventes online de produits alimentaires (plus de 90 %), la livraison à domicile assurée par les enseignes généralistes et les pure-players ou les drives piétons des centres urbains, l’offre alimentaire se décline sous de multiples facettes, chacune adaptée aux modes de vie et aux besoins des consommateurs.
À ces canaux déjà installés dans le paysage français, s’ajoutent de nouveaux acteurs du e-commerce. Très sollicités durant le premier confinement, les circuits courts et plateformes de livraison de produits frais et locaux poursuivent leur déploiement et viennent compléter une offre alimentaire online déjà riche. La recherche de distanciation physique, le besoin de minimiser les contacts avec autrui et les risques de contamination, séduisent, notamment, de nombreux foyers de retraités, largement surreprésentés parmi les nouveaux adeptes du web alimentaire. La mise en place du télétravail a également renforcé l’attrait du e-commerce. Ces nouvelles habitudes ont amené les foyers à y recourir plus fréquemment (2,6 points de plus sur les courses du quotidien), que ce soit sous le format drive ou de la livraison à domicile, via les applications comme Uber Eat ou Deliveroo.
Si l’ascension du e-commerce se poursuit, la marge de progression est encore grande. Selon Nielsen, certains consommateurs se déclarent déçus par l’expérience online en raison de listes de courses non respectées ou incomplètes. Résultat, deux acheteurs sur trois recrutés en 2020 à l’occasion du premier confinement n’ont plus effectué d’achats online de produits de grande consommation par la suite. Sur le drive, l’offre limitée sur les sites et la saturation des créneaux, ont également pesé sur la satisfaction des clients. Preuve que le e-commerce, malgré sa force de frappe évidente, est loin d’avoir remporté la bataille face au commerce physique. D’autant que le commerce de proximité a regagné ses galons durant la crise, rappelant aux consommateurs, l’importance du service et de la relation humaine, au-delà de la transaction.
Francis Luzin
Directeur de la publication