Cette année encore, le printemps n’aura pas été symbole de renouveau. La nouvelle fermeture des commerces “non essentiels” et le potentiel reconfinement qui hante les esprits de tous les Français ces derniers jours ont un goût de déjà-vu. Triste anniversaire du coronavirus et de la mise à l’arrêt, le 17 mars 2020, de notre économie. Depuis plus d’un an, le temps semble suspendre son vol. Le stop and go permanent, depuis 8 mois, fragilise un peu plus des entreprises ébranlées par la baisse des flux en magasin, les fêtes de fin d’année et les soldes ratées. Dans la capitale parisienne, les rideaux baissés en pleine journée et au beau milieu de la semaine de dizaines de commerces ainsi que de tous les cafés et restaurants, dans des rues d’ordinaire très fréquentées aujourd’hui désertes, donnent une impression de ville fantôme et de vie au ralenti.
Pourtant, les choses avaient bien commencé. C’était en 2018. Le centre-ville avait été déclaré “Grande cause nationale”, l’on songeait à un moratoire sur l’extension des zones commerciales en périphérie. L’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) mettait en place son programme Action Cœur de ville (ACV), destiné à revitaliser le cœur de ville de 222 communes françaises. Après des années d’installation anarchique de banques, assurances et agences immobilières qui ont fait flamber le prix des loyers en centre-ville, les mairies s’étaient enfin dotées d’outils administratifs et juridiques pour protéger les linéaires commerciaux et interdire le changement de destination du commerce vers une autre activité de service, redonnant, ainsi de la diversité commerciale aux centres urbains.
Trois ans plus tard et 2,1 Mds€ engagés par l’État, le bilan est positif. Toutes les communes du Plan Action Cœur de Ville sont entrées en phase de déploiement opérationnel de leur projet de revitalisation. Les managers de centre-ville et de commerces ont identifié les poches sensibles à redynamiser, les ressources à mobiliser et les actions à mener par type de secteur et de population. Les villes sont prêtes à faire revivre leurs centres. Étaient. Car c’était sans compter l’arrivée d’un virus nommé Sars-CoV-2, venu mettre à mal tous ces efforts déployés par les CCI et les collectivités. En 2019, la vacance commerciale en centre-ville avoisinait les 12,5 %. Elle pourrait atteindre 16 %, selon les projections, dans les années à venir. La pandémie aura-t-elle raison de la renaissance des cœurs de ville ?
L’on se plaît à croire que non. Certes, les communes commencent à afficher un taux élevé de sinistralité et les choses vont empirer avec la fin des aides de l’État. Mais les fondamentaux sont là. Les villes engagées dans le programme ACV ont déjà opéré la révolution technologique et culturelle qui a permis à leurs commerçants de se digitaliser et de faire preuve d’agilité face aux aléas conjoncturels (la crise) et structurels (la demande des clients). Oui, du chemin reste à faire. Mais il n’y a qu’à voir les initiatives menées par les associations de commerçants et/ou les municipalités à Paris, au Havre, à Cannes, en Ile-de-France, dans l’Hérault et bien d’autres départements pour comprendre que le terreau du commerce de demain est fertile. Il n’attend qu’une chose : que les premiers signaux de la reprise apparaissent pour cueillir les fruits de l’engagement de ses acteurs et du retour à la vie économique et sociale des consommateurs.
Directeur de la publication : Francis Luzin