C’est LA question du moment. Y aura-t-il, ou non, un effet Coupe du monde de football en 2014? Un souffle salvateur qui suffirait à relancer notre vieille machine économique enrayée par la crise? Les marques et les distributeurs n’ont pas attendu d’avoir la réponse pour saisir l’opportunité. De Danone à Coca-Cola, en passant par Monoprix, Auchan ou Boulanger: tous se calent à l’heure brésilienne, déclinant leurs produits aux couleurs du pays organisateur de l’événement. Régis Schultz, le directeur général de Darty France, prévoit un impact bénéfique sur les ventes de téléviseurs. Illustrant, ainsi, l’analyse du directeur Europe des analyses distribution de Nielsen, de Jean-Jacques Vandenheede, sur les ventes de PGC au premier trimestre 2014: “en dépit de deux trimestres négatifs consécutifs, nous nous attendons à une amélioration des volumes au deuxième trimestre, stimulée par une “fin” de Pâques et l’optimisme général autour de la Coupe du monde de football”. Oba?! – hourrah, en portugais- la relance tant espérée tiendrait-elle à un ballon rond?
Trop beau pour être vrai, hélas. À bien y regarder, le souvenir ému de l’équipe de France de football championne du monde, en 1998, n’a eu, en réalité, que de faibles répercussions (si ce n’est nulles) sur l’économie. Reste, toutefois, l’euphorie. Et quand on sait que moral et consommation des ménages sont corrélés, on peut tout de même espérer que la Coupe du monde provoquera un effet booster sur certains produits – articles de sport, pizzas, bières et matériel audio/vidéo – au moins durant les trois semaines du Mondial… Mais après? Pour certains, il faut voir le verre à moitié plein, plutôt que l’inverse. Certes, la Coupe du monde ne va pas régler tous les maux de la France, mais elle va ouvrir un marché prometteur à des commerçants qui n’osaient pas s’y aventurer. Tout particulièrement dans le e-commerce. Seuls 45% des internautes brésiliens achètent en ligne, contre 80% en France: la marge de progression est grande. C’est donc le moment d’y aller, soutiennent les connaisseurs du marché. Et de trouver les relais de croissance que n’offrent plus nos pays matures.
Cette tentation de l’ailleurs, beaucoup de groupes y ont cédé. En témoigne, l’explosion du travel retail: ce business de la mobilité qui vise à séduire une clientèle nomade et argentée, aux quatre coins du monde. Estimé à plus de 36,4 Mds€, le marché est si porteur que L’Oréal l’a baptisé son “sixième continent”. Recruter et fidéliser de nouveaux consommateurs, montrer un autre visage de sa marque, tester des produits innovants: le commerce du voyage est l’un des leviers de rentabilité explorés par les grandes marques… En attendant le fameux retournement économique promis par François Hollande. Ou la qualification des Bleus en finale? Les pronostics sont lancés.
D’un côté, il y a les économistes. Comme le cabinet d’audit et de conseil Grant Thornton qui observe un optimisme des entreprises au plus haut depuis 2007. “Nous sommes entrés dans la première période prolongée de stabilité économique depuis la crise financière”, indique Daniel Kurkdjian, le PDG. Si la croissance n’est pas encore au rendez-vous, les entreprises peuvent à nouveau se projeter dans l’avenir. Un discours qui fait écho aux résultats du dernier baromètre publié par EY sur l’attractivité de l’Europe en 2014: la France se place dans le trio de tête en matière d’investissements étrangers. Retrouvant son niveau de 2010. Une lueur d’espoir, au bout du tunnel? “C’est cyclique. Après une période de restriction, s’en suit toujours un besoin de renouvellement, de relâchement”, note Yves Marmont, vice-président de la FGCA. De leur côté, les supporters des Bleus jouent, eux aussi, la carte de la confiance. Oublié, l’échec de 2010. Plus de 17?000 Français ont acheté leur billet pour le Brésil, faisant le bonheur des agences de voyages, de la Fédération Française de Football… et des spécialistes du travel retail?! À défaut d’une victoire, la Coupe du monde aura au moins été porteuse d’espoir. Et ce n’est déjà pas si mal.